Métrique en Ligne
a voyelle stable
er voyelle ambigüe
e "e" masculin
e "e" féminin
e "e" élidé
e "e" ignoré
e "e" écarté
12 longueur métrique
6-6 mètre
DRX_1/DRX21
Léon DIERX
POÈMES ET POÉSIES
1864
L’Épreuve
L'Invisible, celuiqui règne dans les cieux, 6+6 a
Assembla ses enfantspour lui chanter sa gloire ; 6+6 b
Et Satan était là,qui se dressait près d'eux. 6+6 a
Et le Très-haut lui dit :« D' viens-tu ? — mon histoire 6+6 b
5 Est vieille, réponditl'adversaire : j'ai fait 6+6 c
Tout le tour de ton œuvreavec mon aile noire. 6+6 b
« J'ai délié l'espritque ta règle étouffait ; 6+6 c
J'ai pourri le bon grain,j'ai récolté l'ivraie ; 6+6 a
Tes anges ont raisonde chanter, en effet ! 6+6 c
10 « Leur louange est mensongeet ma parole est vraie : 6+6 a
L'esprit de l'homme est pleind'aversion pour toi. 6+6 b
Nu ne t'aime, hors ceuxque ta rancune effraie. 6+6 a
— « Tu n'as considéréque l'incomplète foi, 6+6 b
Dit l'éternel, de ceuxque l'épreuve terrasse. 6+6 c
15 Les cœurs simples et purssont heureux sous ma loi. 6+6 b
— « Sur un fumier, couvertd'une lèpre vorace, 6+6 c
Un être, dit Satan,sans amis, sans espoir, 6+6 a
Survivait, en opprobreà tous ceux de sa race. 6+6 c
« C'était un homme. Nu,gisant, horrible à voir, 6+6 a
20 Avec un caillou platil grattait ses ulcères, 6+6 b
Le jour durant sans pain,et sans sommeil le soir. 6+6 a
« Si pour te réjouirles maux sont nécessaires, 6+6 b
Il avait en celacent fois bien mérité ; 6+6 c
Car ce juste n'avaitpoint d'égal en misères. 6+6 b
25 « Loin de tous, en dehorsdes murs d'une cité, 6+6 c
Dans le pays de Hus le péché domine, 6+6 a
Il maudissait la vieet ton iniquité. 6+6 c
« Oui, tordu par son mal,mangé par la vermine, 6+6 a
Vile forme sans nomparmi les animaux, 6+6 b
30 Il ouvrait ce regardque la haine illumine. » 6+6 a
Le Très-fort dit : « Qu'importeune chair en lambeaux ? 6+6 b
Le juste est celui seulqui lui-même s'oublie, 6+6 c
Et ne contemple pasuniquement ses maux. 6+6 b
— « Celui-ci n'avait pointune âme ensevelie 6+6 c
35 Dans son propre tourment,si monstrueux qu'il fût : 6+6 a
Les pleurs universelsl'avaient toute remplie. 6+6 c
« Moi, le rôdeur sournoiset qui veille à l'affût, 6+6 a
Le fomenteur subtildes mauvaises pensées, 6+6 b
Je pris ce malheureuxeffroyable pour but. 6+6 a
40 « Et ses chairs tout d'abordfurent cicatrisées ; 6+6 b
Je le guéris sur l'heure,et le soutins debout 6+6 c
N'ayant plus souvenirde ses hontes passées. 6+6 b
« Il regarda la cuve s'amoncelle et bout 6+6 c
L'épais fourmillementdes hommes, et qui fume ; 6+6 a
45 Puis l'horizon qui n'acommencement ni bout ; 6+6 c
« Et je vis qu'il restaitdévoré d'amertume 6+6 a
En songeant à l'angoisse ton peuple croupit 6+6 b
Sous ton œil clos au fondd'une insondable brume. 6+6 a
« Je rendis la jeunesseà son corps décrépit ; 6+6 b
50 Je dressai l'arc noueuxet brisé de son torse ; 6+6 c
Après, j'enveloppaises membres d'un habit. 6+6 b
« La ville flamboyaitcomme une immense amorce. 6+6 c
Je lui dis : « Va ! La vieest bonne ; sois heureux ! » 6+6 a
Et je fis resplendirla beauté sur sa force. 6+6 c
55 « Il y marcha, parmides mendiants poudreux ; 6+6 a
Et je vis, le suivantpas à pas à la piste, 6+6 b
Qu'il se sentait imbudu fiel de leurs yeux creux. 6+6 a
— « Eh bien ! Dit l'être uniqueà Satan : qu'il assiste 6+6 b
Son frère, celui-làqui voit l'appel d'autrui ! 6+6 c
60 Cet homme s'en irajoyeux, s'il était triste. 6+6 b
— « L'aumône, il se peut bien,fait sourire celui 6+6 c
Qui donnant un denierse dit qu'il te le prête, 6+6 a
Et ne place un secoursqu'au taux de ton appui. 6+6 c
« Je connais la prudenceentre toutes secrète ! 6+6 a
65 Lui, supputait, au fondde lui-même, combien 6+6 b
Sont là, pour qui jamaistable ou moisson n'est prête. 6+6 a
« Morne, il allait, disant :« Je ne possède rien ! » 6+6 b
Je l'avais rendu jeuneet fort ; je le fis riche 6+6 c
A ne pouvoir compterses troupeaux ni son bien. 6+6 b
70 « Quiconque errait, sordide,et tel qu'un chien sans niche, 6+6 c
Vendangea dans sa vigneet glana dans son champ. 6+6 a
Mais l'ortie est tenaceau cœur que l'on défriche ! 6+6 c
« Si prodige fût-il,l'avare et le méchant 6+6 a
Pullulent sur la terre ;et lui, voyait sans cesse 6+6 b
75 De maigres doigts nouveauxà ses mains s'accrochant. 6+6 a
« Comprenant que pour unà qui l'on fait largesse 6+6 b
Mille crieront, vers toiles bras en vain dressés, 6+6 c
Généreux, il faisaitl'aumône avec tristesse. 6+6 b
— « Ils ont l'amour, les filsde ceux que j'ai chassés ! 6+6 c
80 Et la femme a des yeux j'ai mis ma lumière. 6+6 a
Pour aimer le très-bon,qu'ils s'aiment ! C'est assez ! 6+6 c
— « Parfois un astre brilleau fond d'une paupière ; 6+6 a
Et l'amour est vraimentle reflet de l'Éden ! 6+6 b
A qui veut l'entrevoir,un ange crie : « Arrière ! » 6+6 a
85 « Comme un ressouvenirdu souriant jardin, 6+6 b
Il la chercha, l'ivresseineffablement pure. 6+6 c
Mais la beauté qui charmea le cruel dédain. 6+6 b
« Il était beau. Toujoursil vivait la torture 6+6 c
De ceux que la laideura marqués en naissant 6+6 a
90 Pour servir à l'amourd'éternelle pâture. 6+6 c
« Il aima. Sa révolteencore allait croissant ; 6+6 a
Car, doué d'un espritque la justice affame, 6+6 b
Les fureurs des jalouxle tenaient frémissant. 6+6 a
« C'est le suprême donque l'amour d'une femme. 6+6 b
95 Mais tout cœur qui se donneest pour d'autres perdu, 6+6 c
Et seul en est joyeuxl'égoïste ou l'infâme. 6+6 b
« Il fut aimé. Mais lui,s'assombrissait, mordu 6+6 c
Par tous les désespoirsque la beauté méprise, 6+6 a
Par le cri furieuxde l'amour entendu. 6+6 c
100 « Si grand qu'un bonheur soit,pour l'homme sans trtrise, 6+6 a
S'il est fait du malheurd'un autre, n'est-ce pas 6+6 b
La coupe de poisonque la main ivre a prise ? 6+6 a
« Et je riais de voirque tout fruit mûr, là-bas, 6+6 b
Est sûrement percépar un ver invisible ; 6+6 c
105 Et qu'il revomissaitles plus puissants appâts. 6+6 b
« Et je prenais toujoursce cœur simple pour cible. 6+6 c
J'élargissais encorla part de son bonheur, 6+6 a
Sans qu'un remercîmentpour toi lui fût possible. 6+6 c
— « Mon œuvre est bon ainsiqu'il est ! dit le seigneur. 6+6 a
110 Et les routes du cielaux hommes sont fermées ! 6+6 b
Je sais cela, repritle parfait raisonneur. 6+6 a
« Les rêves les plus chersaux foules affamées, 6+6 b
Lui, les réalisait.Il fut roi sur les rois 6+6 c
Qui se disent choisispar le dieu des armées. 6+6 b
115 « le meurtre est le plaisir tes fils sont adroits, 6+6 c
C'est la gloire de ceuxqui portent la couronne ; 6+6 a
Mais la sienne chargeaitson front, si tu m'en crois. 6+6 c
« O créateur d'Adam !Quel concert t'environne ! 6+6 a
De tous les avortonsdu couple rejeté, 6+6 b
120 Qui donc plus que ce roise lamenta ? Personne ! 6+6 a
« Léguant l'arrêt divinà leur postérité, 6+6 b
Tous ont gémi, les forts,les lâches, les victimes. 6+6 c
Nul n'a vécu plus pâleet plus épouvanté, 6+6 b
« Que ce puissant, par moisorti des noirs abîmes 6+6 c
125 Pour être sur la terre,et plus qu'eux, revêtu 6+6 a
Du glacial frissonpris à toutes les cimes ! 6+6 c
« le plus affreux suppliceest l'extrême vertu. 6+6 a
Son grand sanglot déborde,et monte dans les âges 6+6 b
Vers celui qui toujoursdans son ombre s'est tu. 6+6 a
130 « Écoute ce qu'il dit,le sage entre les sages : 6+6 b
« Tout n'est que vanité,cendre, fumée ou vent ! 6+6 c
« Et rien ne sert, travaux,fortune, apprentissages ! 6+6 b
« Tout passe et meurt, le fou,l'inepte et le savant ! 6+6 c
« Il n'est rien de nouveau ;tout vient par aventure ! 6+6 a
135 « L'état d'un mort vaut mieuxque l'état d'un vivant ! 6+6 c
« Toutes sortes de mauxrongent la créature, 6+6 a
« Et de tous la penséeest le pire tourment ; 6+6 b
« Et l'amour est amerplus que la sépulture ! » 6+6 a
« Voilà ton œuvre ! Il estrisible assurément 6+6 b
140 De te voir pour celaconvoquer tes phalanges 6+6 c
A t'appeler Très-haut,Très-fort et Très-clément ! 6+6 b
« Dis-leur donc devant moide chanter tes louanges ! » 6+6 c
— Mais celui dont le trôneest au fond des sept cieux, 6+6 a
Ne répondit plus rienau corrupteur des anges ; 6+6 c
145 L'invisible restalà-haut silencieux ! 6+6 a
mètre profil métrique : 6+6
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