Métrique en Ligne
DLP_1/DLP34
corpus Pamela Puntel
Albert DELPIT
L'INVASION
1870
1870
XXXIV
LA RECONNAISSANCE D'UN PEUPLE
Le courant est venu : tout un peuple est debout. 6+6 a
Un langage nouveau fait résonner partout 6+6 a
Ces vieux mots de croisade et de guerre sacrée 6+6 b
Par qui Jérusalem un jour fut délivrée. 6+6 b
5 Et tous les chevaliers français levant les yeux 6+6 a
Voient frissonner la vieille armure des aïeux. 6+6 a
Louis XVI est le roi ? qu'importe un roi de France ! 6+6 b
La croisade moderne est là-bas, et commence ! 6+6 b
Ah ! ce n'est plus le Christ dont ils portent la croix, 6+6 a
10 Ce n'est plus le tombeau de leur Dieu, cette fois, 6+6 a
Qui fait bondir ces cœurs et prendre ces épées. 6+6 b
Plume dont le héros écrit ses épopées ! 6+6 b
Non ! la voix qui leur parle est la voix du canon 6+6 a
Et d'un peuple, dont hier ils ignoraient le nom : 6+6 a
15 Mais elle parle haut une langue inconnue 6+6 b
Qui fendant l'Océan d'un vol leur est venue ! 6+6 b
Ils se lèvent, manants et gentilhommes, tous ! 6+6 a
Celui-ci prend son fils assis sur ses genoux. 6+6 a
Et lui dit, en s'offrant lui-même en sacrifice. 6+6 b
20 — Moi, je suis le soldat croisé pour la justice ! 6+6 b
Cet autre est marié de huit jours seulement 6+6 a
— Oh ! si tôt ! quand l'époux est encore un amant ! — 6+6 a
Mais l'amour vient après cette voix éternelle : 6+6 b
— Je suis le paladin que tout un peuple appelle ! 6+6 b
25 El tous se sont levés, et tous ils sont partis ! 6+6 a
Ils arrivent… grand Dieu ! quels tourments ressentis, 6+6 a
Pendant cette effrayante et rude traversée ! 6+6 b
S'ils avaient pu combattre au moins par la pensée ! 6+6 b
Ils arrivent… Enfin ! Pourquoi ? pour conquérir ? 6+6 a
30 Non ! pour sauver un peuple, ou sinon pour mourir ! 6+6 a
Dites à Washington de relever la tête : 6+6 b
C'est l'âme de la France aux mains de Lafayette ! 6+6 b
Sabre au vent ! déployez l'oriflamme au lys blanc ! 6+6 a
Montjoie-Sainl-Denis s'unit à Fatherland ! 6+6 a
35 Au galop ! au galop à travers la savane 6+6 b
Que suit, l'orgueil au cœur, la grande caravane ! 6+6 b
Elle va dans son sang qui ruisselle partout ; 6+6 a
Sachant quel est le prix que Dieu lui garde au bout, 6+6 a
Car elle voit au loin, chaque fois qu'elle avance. 6+6 b
40 Le jour étincelant d'un peuple qui commence ! 6+6 b
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Près d'un siècle a passé : ce peuple est grand et fort. 6+6 a
Oh ! combien de Français ont rencontré la mort ! 6+6 a
Dans la campagne, au fond du bois sonore et sombre, 6+6 b
J'imagine qu'on voit se promener leur ombre, 6+6 b
45 Qui pensive, accoudée au bord de son tombeau, 6+6 a
Et songeant au passé, songeant à Rochambeau, 6+6 a
Songeant à tous enfin, dit en levant la tête : 6+6 b
— Voilà l’œuvre pourtant que notre sang a faite ! 6+6 b
Puis elle entend au loin une voix dans le ciel 6+6 a
50 C'est la France qui meurt et qui bat le rappel, 6+6 a
De ses enfants, de ceux qu'elle a voulu défendre 6+6 b
Alors, le vieux héros se penche pour entendre 6+6 b
Si rien ne va répondre à ce sanglot profond 6+6 a
Allons donc ! Washington est mort, rien ne répond ! 6+6 a
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
55 A genoux sur ton sol où toujours le sang monte, 6+6 b
Comme un maudit qui pleure en regardant sa honte, 6+6 b
Moi, libre citoyen du peuple américain, 6+6 a
Qui ne s'est pas penché pour te tendre la main, 6+6 a
Et reste à contempler tes malheurs qui grandissent, 6+6 b
60 Moi, certain que là-bas les cœurs fiers m'applaudissent, 6+6 b
France, du sang de ceux dont tu nous as fait don, 6+6 a
Je viens très-humblement te demander pardon ! 6+6 a
mètre profil métrique : 6+6
forme globale type : suite de distiques
schéma : 31((aa))
logo du CRISCO logo de l'université