Métrique en Ligne
a voyelle stable
er voyelle ambigüe
e "e" masculin
e "e" féminin
e "e" élidé
e "e" ignoré
e "e" écarté
12 longueur métrique
6-6 mètre
DLP_1/DLP14
corpus Pamela Puntel
Albert DELPIT
L'INVASION
1870
1870
XIV
HISTOIRE QUOTIDIENNE
Les Prussiens maudits ont pillé cette ferme, 6+6 a
La brûlant, et prenant tout ce qu'elle renferme, 6+6 a
Volant les bœufs, laissant comme un spectre debout 6+6 b
La misère toujours, et la honte partout. 6+6 b
5 Ensuite, pour finir ainsi qu'à l'ordinaire, 6+6 a
Ils ont tué l'enfant et violé la mère, 6+6 a
Et puis ils sont partis, en' laissant derrière eux 6+6 b
La mort dans ce vallon si doux et si joyeux. 6+6 b
Cependant, le fermier s'en revient de la ville. 6+6 a
10 Dès l'aube, appelé là pour une affaire utile, 6+6 a
Il prit entre ses bras la mère et le petit, 6+6 b
Les embrassa tous deux sur le front, et partit. 6+6 b
C'est un brave homme : il n'a que doux amours dans l'âme, 6+6 a
Deux amours saints et forts : son enfant et sa femme. 6+6 a
15 Aussi, pour arriver plus tôt à la maison, 6+6 b
Il va vite, malgré le chaud de la saison. 6+6 b
— Bonne Jeanne ! dit-il, va-t-elle être contente 6+6 a
De me voir revenir si tôt avant l'attente ! 6+6 a
Et-le bébé ! Je vois son gai bonheur d'enfant : 6+6 b
20 Comme il va m'embrasser, le diable ! en m'étouffant, 6+6 b
Le teint chaud, et les yeux brûlants de convoitise, 6+6 a
Afin de s'emparer plus tôt de la surprise : 6+6 a
C'est plus beau que jamais il ne l'aurait rêvé… 6+6 b
Encore trois quarts d'heure et je suis arrivé. 6+6 b
25 La surprise, c'était un grand polichinelle 6+6 a
Que l'on faisait sauter en tirant la ficelle. 6+6 a
Il arrive au chemin qui mène à la maison : 6+6 b
— C'est étrange, on dirait que je perds la raison, 6+6 b
Se dit-il ; mais vraiment je sens mon cœur qui tremble. 6+6 a
30 Je suis fou ! Je n'ai rien à craindre, ce me semble ; 6+6 a
A la ville, on disait qu'ils étaient loin : ainsi, 6+6 b
On ne doit pas s'attendre à les voir par-ici. 6+6 b
Il arrive. Grand Dieu ! plus rien que la ruine ! 6+6 a
La ferme incendiée et pillée ! Il devine ! 6+6 a
35 Il devine que là les Maudits ont passé, 6+6 b
Qu'ils ont semé la mort, et qu'ils n'ont rien laissé. 6+6 b
Presque fou, l’œil hagard, il court dans les décombres : 6+6 a
Jeanne ! Paul ! —Rien. — Là bas, il aperçoit doux ombres… 6+6 a
Ce sont eux… Non ! Il court, appelant son enfant, 6+6 b
40 Sa femme… — Rien encor ! rien qu'un air étouffant 6+6 b
Qui monte en s'échappant de ce carnage immense : 6+6 a
Rien que le désespoir, et rien que le silence ! 6+6 a
Où sont-ils ? Juste ciel ! Comprenez-vous cela ? 6+6 b
Chercher ses deux amours qu'on avait laissés là, 6+6 b
45 Et ne plus rien trouver ! Où sont-ils ? Il appelle 6+6 a
Rien encor ne répond à sa voix ! Il chancelle 6+6 a
Où sont-ils ? Dans la cour ? Vide ! Au bois, près d'ici ? 6+6 b
Vide ! Dans le jardin alors ? Non, vide aussi ! 6+6 b
— Voyons ! voyons ! dit-il, ils sont chez des voisines 6+6 a
50 Ils n'auront pas voulu rester dans ces ruines ; 6+6 a
Seuls, ils auront eu peur : ce n'est pas étonnant… 6+6 b
Eh bien ! voilà-t-il pas que je ris maintenant ? 6+6 b
C'est que l'émotion était bien naturelle ! 6+6 a
— Que diable ai-je donc là ? C'est le polichinelle ! 6+6 a
55 Pauvre petit ! va-t-il être content demain !… 6+6 b
Tout à coup il s'arrête au milieu du chemin, 6+6 b
Et pousse un cri, ce cri que jette dans sa haine 6+6 a
L'homme que la douleur terrasse comme un chêne… 6+6 a
Devant lui, dans le sang où s'impriment ses pas, 6+6 b
60 La mère morte, ayant l'enfant mort dans ses bras ! 6+6 b
Il tourna sur lui-même, et roula sur la pierre. 6+6 a
Quand il revint à lui, dans la nuit, sans lumière, 6+6 a
Il prit ses deux amours qui dormaient toujours là 6+6 b
L'un sur l'autre, creusa leur tombe, et s'en alla. 6+6 b
mètre profil métrique : 6+6
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