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C = clitique
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F = "e" féminin
| = césure
DES_2/DES228
Marceline DESBORDES-VALMORE
LES PLEURS
1830
RÉVEIL
Avoir aimé, ce n’est plus vivre.
Parny.
C’est qu’ils parlaient de toi, quand, loin du cercle assise, 6+6 a
Mon livre trop pesant tomba sur mes genoux ; 6+6 b
C’est qu’ils me regardaient, quand mon âme indécise 6+6 a
Osa braver ton nom qui passait entre nous ! 6+6 b
5 Et puis leurs voix riaient ! J’ai pu rester sans crainte. 6+6 a
On disait ton bonheur et tes belles amours. 6+6 b
À mon livre fermé moi je lisais toujours, 6+6 b
Car sur mon front baissé toute une âme était peinte ! 6+6 a
Te voilà donc heureux ! Je sais donc tout prévoir ! 6+6 a
10 Je ne crains donc plus rien… rien, que de te revoir. 6+6 a
Heureux par tant d’objets, je respire moi-même ; 6+6 a
Sur deux cœurs à la fois je n’ai plus à gémir ; 6+6 b
Je dirai : « Quel bonheur ! ce n’est plus moi qu’il aime ; 6+6 a
D’autres ont pris mes pleurs… et je pourrai dormir ! » 6+6 b
15 Reste à ce doux éclat qui rayonne autour d’elles : 6+6 a
Leur front se baigne encor dans l’air pur du matin, 6+6 b
Et je leur sais gré d’être belles, 8 a
Si ces fleurs d’un moment consolent ton destin. 6+6 b
Mais le voir ! ah ! c’est trop ! N’attends pas l’impossible ! 6+6 a
20 Laisse au ruisseau désert son cours triste et paisible ; 6+6 a
Ne viens pas me surprendre, et, d’un regard glacé, 6+6 a
Me défendre de vivre au moins dans le passé ! 6+6 a
Ne viens pas dans mes traits qu’un tourment décolore, 6+6 a
Plus voilés, plus rêveurs encore, 8 a
25 Oh ! ne viens pas compter, malgré moi découverts, 6+6 a
Les pleurs que j’ai versés, les jours que j’ai soufferts ! 6+6 a
Laisse-moi m’isoler dans l’oubli de mes peines ; 6+6 a
D’un esclave qui dort ne heurte pas les chaînes. 6+6 a
Si je dois au passé quelques éclairs heureux, 6+6 a
30 Il est temps de mourir à ce qu’il eut d’affreux. 6+6 a
Ne fais plus fermenter dans mon âme troublée 6+6 a
Tous ces germes amers où s’éteint la raison ; 6+6 b
Laisse tomber en paix une fleur accablée, 6+6 a
Atteinte dans le cœur d’un tranquille poison. 6+6 b
35 Tu le sais, comme on voit un calme et frais breuvage 6+6 a
Tourner pendant l’orage, 6 a
Tu le sais ! quand l’amour gronde et fait tant souffrir, 6+6 a
La douce humeur de l’âme est facile à s’aigrir. 6+6 a
J’ai senti… (le dirai-je ? oui, s’accuser soi-même 6+6 a
40 Est peut-être un besoin d’absoudre ce qu’on aime.) 6+6 a
J’ai senti tout mon cœur s’élever contre toi ; 6+6 a
J’ai supplié la mort d’éteindre ma mémoire ; 6+6 b
Oui, j ’ai haï ton nom ! oui, j’ai haï ta gloire ! 6+6 b
Ah ! c’est que je t’aimais alors : pardonne-moi ! 6+6 a
mètre profils métriques : 8, 6+6, (6)
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