Métrique en Ligne
P = préposition
C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
DES_2/DES213
Marceline DESBORDES-VALMORE
LES PLEURS
1830
TOI ! ME HAIS-TU ?
Quand tu souris en homme à ces tendres orages 6+6 a
Qui troublent dans l’amour de plus faibles courages, 6+6 a
Que j’aime, de ta voix démentant la gté, 6+6 b
Ce nuage qui passe à ton front attristé ! 6+6 b
5 Après que je t’ai dit ma plainte toute entière, 6+6 a
Calmée à ton silence éloquent et rêveur, 6+6 b
Quand je sens tes doux yeux brûler sur ma paupière, 6+6 a
Dis ! n’est-ce pas ton cœur qui regarde mon cœur ? 6+6 b
Il m’éblouit de joie ! il endort mes alarmes. 6+6 a
10 Sais-tu de quel espoir il relève mon sort ? 6+6 b
J’y vois toute une vie, et je la vois sans larmes, 6+6 a
Et je n’ai plus peur de la mort ! 8 b
Toi qui m’as seule aimée, écoute : si tu changes, 6+6 a
Je te pardonnerai sans t’imiter jamais ; 6+6 b
15 Car de cet amour vrai dont s’adorent les anges 6+6 a
Je sens que je t’aimais. 6 b
Et sans ton cœur, mon cœur comme un poids inutile, 6+6 a
Tel qu’en ce froid cadran palpite un plomb mobile, 6+6 a
De la nuit à l’aurore et de l’aurore au soir, 6+6 b
20 Battra jusqu’au tombeau, sans joie et sans espoir. 6+6 b
Et, j’en demande à Dieu pardon plus qu’à toi-même, 6+6 a
Je ne veux pas revivre où l’on dit que l’on aime, 6+6 a
Si l’on t’y donne un bien qui ne sera plus moi, 6+6 b
Et si Dieu m’y destine un autre ange que toi. 6+6 b
25 Le néant me plaît mieux ; son horreur me soulage : 6+6 a
Jamais je ne t’ai vu sans t’aimer davantage ; 6+6 a
Et jamais, plus rêveuse en te quittant le soir, 6+6 b
Sans pâlir dans l’effroi de ne te plus revoir ! 6+6 b
C’est que Dieu pour nos jours n’alluma point deux flammes ; 6+6 a
30 C’est qu’un même baiser fit éclore deux âmes ; 6+6 a
Que partout où je passe en appelant ta main, 6+6 b
Le doux poids de tes pieds a creusé mon chemin. 6+6 b
Enfin, que ma pensée, orageuse ou calmée, 6+6 a
Se dévoile riante, ou s’enferme alarmée, 6+6 a
35 Comme on voit la cigale au front tremblant des blés, 6+6 b
Craintive, au moindre bruit tarir ses chants troublés ; 6+6 b
Toujours teinte de ton image, 8 c
C’est l’eau sous le soleil, quand j’y sens ton amour ; 6+6 d
Et si pour d’autres yeux tes yeux ont un langage, 6+6 c
40 C’est l’eau, miroir éteint d’où s’efface le jour. 6+6 d
Toi ! me hais-tu ? dis vrai ! t’ai-je offensé, mon âme ? 6+6 a
Dis : quelque mot amer dans un pli de ton cœur 6+6 b
Parle-t-il contre moi, ta sœur, ta faible femme ? 6+6 a
Oh ! parle : as-tu jamais compris une autre sœur ? 6+6 b
45 Non ! j’ai froid d’y penser. Tendresse inexprimable ! 6+6 a
Ignores-en toujours les effrois douloureux. 6+6 b
Ne prends de mon amour que ce qu’il a d’aimable, 6+6 a
Et ne garde du tien que ce qui rend heureux ! 6+6 b
Mais, laisse-moi t’aimer ! Laisse-moi vivre encore ! 6+6 a
50 Laisse ton nom sur moi comme un rayon d’espoir ! 6+6 b
Mais, dans le mot demain laisse-moi t’entrevoir, 6+6 b
Et, si j’ai d’autres jours, viens me les faire éclore ! 6+6 a
mètre profils métriques : 8, 6+6, (6)
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