Métrique en Ligne
P = préposition
C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
DES_1/DES8
Marceline DESBORDES-VALMORE
POÉSIES
1830
IDYLLES
LE MIROIR
Comme un enfant cruel tourmente la douceur 6+6 a
De l’agneau craintif qu’il enchaîne, 8 b
Amour, je t’ai vu rire à l’accent de ma peine. 6+6 b
J’en ai pleuré pour toi, de honte et de douleur. 6+6 a
5 Mais l’agneau gémissant rêve au joug qui l’opprime ; 6+6 a
Il le brise en silence et retourne au vallon. 6+6 b
Adieu, cruel enfant dont je fus la victime, 6+6 a
Adieu, le pauvre agneau m’a rendu la raison. 6+6 b
Joyeux et bondissant des vallons aux prairies, 6+6 a
10 Dégagé de l’anneau de fer 8 b
Qui le blessa longtemps sous des chaînes fleuries, 6+6 a
Il voit l’herbe plus verte et le ruisseau plus clair. 6+6 b
Ma fierté languissante est enfin éveillée ; 6+6 a
Je repousse en fuyant tes amères faveurs, 6+6 b
15 Et, sous ma guirlande effeuillée, 8 a
J’ai brisé tes fers imposteurs. 8 b
Ne viens pas me troubler, Amour ! je suis heureuse ; 6+6 a
Je ne sens plus le poids d’un lien détesté. 6+6 b
Mais quoi ! sa fraîche empreinte est encor douloureuse. 6+6 a
20 Ah ! laisse un long repos au cœur qui l’a porté ! 6+6 b
Va rendre ce lien à l’ingrat que j’oublie : 6+6 a
C’est à toi d’obéir, tu n’es plus mon vainqueur ; 6+6 b
Tu ne l’es plus ! Mes chants, ma liberté, ma vie, 6+6 a
J’ai tout repris avec mon cœur. 8 b
25 Qu’il promène le sien sur tes ailes légères. 6+6 a
Je le verrai sans trouble ; il n’est plus rien pour moi. 6+6 b
Je ne l’attendrai plus aux fêtes bocagères ; 6+6 a
À peine il me souvient qu’il y surprit ma foi. 6+6 b
Je l’ ai fui tout un jour sans répandre de larmes, 6+6 a
30 Tout un jour ! Ah ! pour lui mes yeux n’ont plus de pleurs. 6+6 b
Je souris au miroir en essayant des fleurs, 6+6 b
Et le miroir m’apprend qu’un sourire a des charmes. 6+6 a
Comme le lin des champs flotte au gré des zéphyrs, 6+6 a
J’abandonne ma chevelure, 8 b
35 Qui va flotter à l’aventure, 8 b
Ainsi que mes nouveaux désirs. 8 a
Oui, l’ air qui m’environne, épuré par l’orage, 6+6 a
Me rendra, comme aux fleurs, l’éclat et la beauté, 6+6 b
Et bientôt mon sort, sans nuage, 8 a
40 Brillera comme un jour d’été. 8 b
Mais non, je ne veux point de fleurs dans ma parure ; 6+6 a
Ce qu’il aimait ne doit plus m’embellir. 4+6 b
Cachons-les avec soin ; s’il venait, le parjure, 6+6 a
Il croirait que pour lui j’ai daigné les cueillir. 6+6 b
45 S’il venait… Qu’ai-je dit ? Quoi ! son audace extrême 6+6 a
Le ramènerait-elle où mon courroux l’attend ? 6+6 b
Pourrait-il s’arracher à ce monde qu’il aime, 6+6 a
À ce juge léger qui flatte un inconstant ? 6+6 b
Au fond de mon miroir je vois errer son ombre ; 6+6 a
50 Une ombre plus légère appelle son regard ; 6+6 b
Il la cherche lui-même, il l’aborde ; il fait sombre ; 6+6 a
Il soupire… Ah ! perfide ! est-ce encor le hasard ?… 6+6 b
Oh ! comme il la regarde ! Oh ! comme il est près d’elle ! 6+6 a
Comme il lui peint l’ardeur qu’il feignit avec moi ! 6+6 b
55 Il ne feint plus, car elle est belle : 8 a
Amour ! va les unir, ils n’attendent que toi ! 6+6 b
Je garde mes bouquets. Ma parure est finie. 6+6 a
Ma parure ! Et pour qui tant de soins superflus ? 6+6 b
Ce beau jour est voilé, cette glace est ternie, 6+6 a
60 Et le miroir ne sourit plus. 8 b
mètre profils métriques : 8, 6+6, (4+6)
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