Métrique en Ligne
a voyelle stable
er voyelle ambigüe
e "e" masculin
e "e" féminin
e "e" élidé
e "e" ignoré
e "e" écarté
12 longueur métrique
6-6 mètre
DES_1/DES141
Marceline DESBORDES-VALMORE
POÉSIES
1830
POÉSIES DIVERSES
CONTE D’ENFANT
Il ne faut plus courir à travers les bruyères, 6+6 a
Enfant, ni sans congé vous hasarder au loin. 6+6 b
Vous êtes très petit, et vous avez besoin 6+6 b
Que l’on vous aide encore à dire vos prières. 6+6 a
5 Que feriez-vous aux champs, si vous étiez perdu ? 6+6 a
Si vous ne trouviez plus le sentier du village ? 6+6 b
On dirait : « Quoi ! si jeune, il est mort ? c’est dommage ! » 6+6 b
Vous crieriez… De si loin seriez-vous entendu ? 6+6 a
Vos petits compagnons, à l’heure accoutumée, 6+6 a
10 Danseraient à la porte et chanteraient tout bas ; 6+6 b
Il faudrait leur répondre, en la tenant fermée : 6+6 a
« Une mère est malade, enfants, ne chantez pas ! » 6+6 b
Et vos cris rediraient : « Ô ma mère ! ô ma mère ! » 6+6 a
L’écho vous répondrait, l’écho vous ferait peur. 6+6 b
15 L’herbe humide et la nuit vous transiraient le cœur. 6+6 b
Vous n’auriez à manger que quelque plante amère ; 6+6 a
Point de lait, point de lit !… Il faudrait donc mourir ? 6+6 a
J’en frissonne ! et vraiment ce tableau fait frémir. 6+6 a
Embrassons-nous, je vais vous conter une histoire ; 6+6 a
20 Ma tendresse pour vous éveille ma mémoire. 6+6 a
« Il était un berger, veillant avec amour 6+6 a
Sur des agneaux chéris, qui l’aimaient à leur tour. 6+6 a
Il les désaltérait dans une eau claire et saine, 6+6 a
Les baignait à la source, et blanchissait leur laine ; 6+6 a
25 De serpolet, de thym, parfumait leurs repas ; 6+6 a
Des plus faibles encor guidait les premiers pas ; 6+6 a
D’un ruisseau quelquefois permettait l’escalade. 6+6 a
Si l’un d’eux, au retour, traînait un pied malade, 6+6 a
Il était dans ses bras tout doucement porté, 6+6 a
30 Et, la nuit, sur son lit, dormait à son côté ; 6+6 a
Réveillés le matin par l’aurore vermeille, 6+6 a
Il leur jouait des airs à captiver l’oreille ; 6+6 a
Plus tard, quand ils broutaient leur souper sous ses yeux, 6+6 a
Aux sons de sa musette il les rendait joyeux. 6+6 a
35 Enfin il renfermait sa famille chérie 6+6 a
Dedans la bergerie. 6 a
Quand l’ombre sur les champs jetait son manteau noir, 6+6 a
Il leur disait : « Bonsoir, 6 a
Chers agneaux ! sans danger reposez tous ensemble ; 6+6 a
40 L’un par l’autre pressés, demeurez chaudement ; 6+6 b
Jusqu’à ce qu’un beau jour se lève et nous rassemble, 6+6 a
Sous la garde des chiens dormez tranquillement. » 6+6 b
Les chiens rôdaient alors, et le pasteur sensible 6+6 a
Les revoyait heureux dans un rêve paisible. 6+6 a
45 Eh ! ne l’étaient-ils pas ? Tous bénissaient leur sort, 6+6 a
Excepté le plus jeune ; hardi, malin, folâtre, 6+6 b
Des fleurs, du miel, des blés et des bois idolâtre, 6+6 b
Seul il jugeait tout bas que son maître avait tort. 6+6 a
Un jour, riant d’avance, et roulant sa chimère, 6+6 a
50 Ce petit fou d’agneau s’en vint droit à sa mère. 6+6 a
Sage et vieille brebis, soumise à son pasteur. 6+6 a
« Mère ! écoutez, dit-il ; d’où vient qu’on nous enferme ? 6+6 b
Les chiens ne le sont pas, et j’en prends de l’humeur. 6+6 a
Cette loi m’est trop dure, et j’y veux mettre un terme. 6+6 b
55 Je vais courir partout, j’y suis très résolu. 6+6 a
Le bois doit être beau pendant le clair de lune. 6+6 b
Oui, mère, dès ce soir je veux tenter fortune : 6+6 b
Tant pis pour le pasteur, c’est lui qui l’a voulu. 6+6 a
— Demeurez, mon agneau, dit la mère attendrie ; 6+6 a
60 Vous n’êtes qu’un enfant, bon pour la bergerie ; 6+6 a
Restez-y près de moi ! Si vous voulez partir, 6+6 a
Hélas ! j ! ose pour vous prévoir un repentir. 6+6 a
— J’ose vous dire non, cria le volontaire… » 6+6 a
Un chien les obligea tous les deux à se taire. 6+6 a
65 Quand le soleil couchant au parc les rappela 6+6 a
Et que par flots joyeux le troupeau s’écoula, 6+6 a
L’agneau sous une haie établit sa cachette ; 6+6 a
Il avait finement détaché sa clochette. 6+6 a
Dès que le parc fut clos, il courut à l’entour. 6+6 a
70 Il jouait, gambadait, sautait à perdre haleine. 6+6 b
« Je voyage, dit-il, je suis libre à mon tour ! 6+6 a
Je ris, je n’ai pas peur ; la lune est claire et pleine : 6+6 b
Allons au bois, dansons, broutons ! » Mais, par malheur, 6+6 a
Des loups pour leurs enfants cherchaient alors curée : 6+6 b
75 Un peu de laine, hélas ! sanglante et déchirée, 6+6 b
Fut tout ce que le vent daigna rendre au pasteur. 6+6 a
Jugez comme il fut triste, à l’aube renaissante ! 6+6 a
Jugez comme on plaignit la mère gémissante ! 6+6 a
« Quoi ! ce soir, cria-t-elle, on nous appellera, 6+6 a
80 Et ce soir… et jamais l’agneau ne répondra ! » 6+6 a
En l’appelant en vain elle affligea l’Aurore ; 6+6 a
Le soir elle mourut en l’appelant encore. 6+6 a
mètre profils métriques : 6, 6+6
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