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| = césure
COR_1/COR116
Pierre CORNEILLE
Imitation De Jésus-Christ
1656
LIVRE TROISIÈME
CHAPITRE XLVII
Que pour la vie éternelle il faut endurer
les choses les plus fâcheuses.
Ne te rebute point, mon fils, de ces travaux 6+6 a
Que l'ardeur de ton zèle entreprend pour ma gloire ; 6+6 b
Ne te laisse jamais abattre sous les maux 6+6 a
Qui te veulent des mains enlever la victoire. 6+6 b
5 En quelque triste état que leur rigueur t'ait mis, 6+6 c
Songe à ce que je t'ai promis, 8 c
Reprends cœur là-dessus, espère, et te console : 6+6 d
Je rendrai tes desirs pleinement satisfaits, 6+6 e
Et j'ai toujours de quoi dégager ma parole 6+6 d
10 Par l'abondance des effets. 8 e
Tu n'auras point ici longtemps à te lasser, 6+6 a
Tes douleurs n'y sont pas d'une éternelle suite : 6+6 b
Un peu de patience, et tu verras passer 6+6 a
Ce torrent de malheurs où ta vie est réduite. 6+6 b
15 Un jour, un jour viendra que ce rude attirail 6+6 c
De soins, de troubles, de travail, 8 c
Fera place aux douceurs de la paix desirée : 6+6 d
Cependant souviens-toi que les maux les plus grands 6+6 e
Ne sont que peu de chose, et de peu de durée, 6+6 d
20 Quand ils cessent avec le temps. 8 e
Applique à me servir une assiduité 6+6 a
Qui de ce que tu dois jamais ne se dispense ; 6+6 b
Travaille dans ma vigne avec fidélité, 6+6 a
Et je serai moi-même enfin ta récompense. 6+6 b
25 Écris, lis, chante, prie, et gémis tout le jour, 6+6 c
Garde le silence à son tour, 8 c
Supporte avec grand cœur tous les succès contraires : 6+6 d
Leur plus longue amertume aura de doux reflus, 6+6 e
Et la vie éternelle a d'assez grands salaires 6+6 d
30 Pour être digne encor de plus. 8 e
Oui, tu verras un jour finir tous ces ennuis ; 6+6 a
Dieu connoît ce grand jour, qu'autre ne peut connoître : 6+6 b
Tu ne verras plus lors ni les jours ni les nuits, 6+6 a
Comme ici tu les vois, s'augmenter ou décroître ; 6+6 b
35 D'une clarté céleste un long épanchement 6+6 c
Fera briller incessamment 8 c
D'un rayon infini la splendeur ineffable ; 6+6 d
Et d'une ferme paix le repos assuré 6+6 e
Versera dans ton cœur le calme invariable 6+6 d
40 Que ces maux t'auront procuré. 8 e
Tu ne diras plus lors : « qui pourra m'affranchir 6+6 a
De la mort que je traîne, et des fers que je porte ? » 6+6 b
Tu ne crieras plus lors : « faut-il ainsi blanchir ? 6+6 a
Faut-il voir prolonger mon exil de la sorte ? » 6+6 b
45 La mort, précipitée aux gouffres du néant, 6+6 c
N'aura plus ce gosier béant, 8 c
Dont tout ce qui respire est l'infaillible proie ; 6+6 d
Et la santé sans trouble et sans anxiété 6+6 e
N'y laissera goûter que la parfaite joie 6+6 d
50 D'une heureuse société. 8 e
Que ne peux-tu, mon fils, percer jusques aux cieux, 6+6 a
Pour y voir de mes saints la couronne éternelle, 6+6 b
Les pleins ravissements qui brillent dans leurs yeux, 6+6 a
Le glorieux éclat dont leur front étincelle ! 6+6 b
55 Voyant ces grands objets d'un injuste mépris 6+6 c
En remporter un si haut prix, 8 c
Eux qu'à peine le monde a crus dignes de vivre, 6+6 d
Ta sainte ambition les voudroit égaler, 6+6 e
Te régleroit sur eux, et sauroit pour les suivre 6+6 d
60 Jusqu'en terre te ravaler. 8 e
Tous les abaissements te sembleroient si doux, 6+6 a
Qu'en haine des honneurs où ta folie aspire, 6+6 b
Tu choisirois plutôt d'être soumis à tous, 6+6 a
Que d'avoir sur un seul quelque reste d'empire. 6+6 b
65 Les beaux jours de la vie et les charmes des sens, 6+6 c
Pour toi devenus impuissants, 8 c
Te laisseroient choisir ce mépris en partage : 6+6 d
Tu tiendrois à bonheur d'être persécuté, 6+6 e
Et tu regarderois comme un grand avantage 6+6 d
70 Le bien de n'être à rien compté. 8 e
Si tu pouvois goûter toutes ces vérités, 6+6 a
Si jusque dans ton cœur elles étoient empreintes, 6+6 b
Tout un siècle de honte et de calamités 6+6 a
Ne t'arracheroit pas un seul moment de plaintes : 6+6 b
75 Tu dirois qu'il n'est rien de si laborieux 6+6 c
Que pour un prix si glorieux 8 c
Il ne faille accepter, sitôt qu'on le propose, 6+6 d
Et que perdre ou gagner le royaume de Dieu, 6+6 e
Quoi qu'en jugent tes sens, n'est pas si peu de chose, 6+6 d
80 Qu'il faille y chercher un milieu. 8 e
Lève donc l'œil au ciel pour m'y considérer, 6+6 a
Vois-y mes saints assis au-dessus du tonnerre, 6+6 b
Après tant de tourments soufferts sans murmurer, 6+6 a
Après tant de combats qu'ils ont rendus sur terre. 6+6 b
85 Ces illustres vainqueurs des tribulations 6+6 c
Goûtent les consolations 8 c
D'une joie assurée et d'un repos sincère : 6+6 d
Assis à mes côtés sans trouble et sans effroi, 6+6 e
Ils règnent avec moi dans le sein de mon père, 6+6 d
90 Et vivront sans fin avec moi. 8 e
mètre profils métriques : 8, 6+6
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