Métrique en Ligne
a voyelle stable
er voyelle ambigüe
e "e" masculin
e "e" féminin
e "e" élidé
e "e" ignoré
e "e" écarté
12 longueur métrique
6-6 mètre
COP_5/COP158
François COPPÉE
Sonnets intimes et Poèmes inédits
1925
DEUXIÈME PARTIE
ULTIMA VERBA
BIEN que raclantencor de la guitare, 4+6 a
J’ai la moitiéd’un siècle, c’est bien clair. 4+6 b
Je tousse trop,cela tourne au catarrhe, 4+6 a
Et suis, hélas !lorsque revient l’hiver, 4+6 b
5 A la mercidu moindre courant d’air. 4+6 b
Plus d’une placeen ma bouche est vacante. 4+6 c
Je m’alourdis ;ma halte est plus fréquente, 4+6 c
Lorsque je faisles chemins coutumiers. 4+6 d
Et la jeunesseà cinquante ans — cinquante ! — 4+6 c
10 C’est seulementpour les jeunes-premiers. 4+6 d
L’âge m’est dur,bien que je m’y résigne. 4+6 a
Je blanchis peu,ce qui n’est point normal. 4+6 b
Des cheveux grispeut-être suis-je indigne ? 4+6 a
En moi pourtants’affaiblit l’animal. 4+6 b
15 Je m’endors tardet je digère mal. 4+6 b
J’ai bien toujoursune petite amie, 4+6 c
Mais c’est avecbeaucoup d’économie 4+6 c
Que je lui prouveencor mon sentiment. 4+6 d
Je me sens vieux,même à l’Académie. 4+6 c
20 Si je faisaisun peu mon testament. 4+6 d
On n’en meurt pas.Et puis, la mort ? J’y pense 4+6 a
D’un ferme cœuret sans jamais frémir. 4+6 b
C’est le reposet c’est la récompense 4+6 a
Du malheureuxfatigué de gémir. 4+6 b
25 Hamlet a bienraison : « Mourir ! Dormir ! » 4+6 b
Le bonheur mêmeà la fin nous dégte. 4+6 c
Des jeunes genstombés à moitié route, 4+6 c
Les Grecs disaient :Ils sont aimés des Dieux ! » 4+6 d
Quant au terribleau-delà qu’on redoute, 4+6 c
30 J’en suis certain,ce n’est rien ou c’est mieux. 4+6 d
Si ce n’est rien,tout est dit. Mais j’espère 4+6 a
En ce Dieu bon,que, priant à deux mains, 4+6 b
Petit enfant,j’appelais : « Notre Père ! » 4+6 a
Il doit donnerde meilleurs lendemains 4+6 b
35 Au triste sortsubi par les humains. 4+6 b
Je ne sais passi la mort les délivre, 4+6 c
Mais aucun d’euxne demandait à vivre ; 4+6 c
C’est dans les pleursque tous ont vu le jour ; 4+6 d
Et, dans l’étroitsentier qu’il leur faut suivre, 4+6 c
40 Que trouvent-ilsde bon qu’un peu d’amour ? 4+6 d
Il est couvertd’impénétrables voiles, 4+6 a
Le grand mystèreentrevu, chaque soir, 4+6 b
Dans l’effrayantabîme plein d’étoiles. 4+6 a
Nul ne sait rien,nul ne peut rien savoir. 4+6 b
45 Mais, malgré tout,je m’obstine à l’espoir. 4+6 b
Quant à l’effroid’un éternel supplice, 4+6 c
Qu’un front chargéde génie en pâlisse 4+6 c
Et qu’un Pascal —j’y songe avec stupeur — 4+6 d
Craignant l’Enfer,meure sous le cilice, 4+6 c
50 C’est trop absurde,et je n’en ai pas peur. 4+6 d
Non, de révolte,au contraire, je vibre. 4+6 a
Pour mériterun pareil châtiment, 4+6 b
L’homme est-il donccoupable ! Il n’est pas libre. 4+6 a
Car ses instinctset son tempérament 4+6 b
55 Le font esclave ;et le dogme nous ment. 4+6 b
Le Jéhovahqui brûle les Sodomes 4+6 c
Est responsableautant que nous le sommes, 4+6 c
Si notre crimeest, d’abord, d’être nés ; 4+6 d
Devant un Dieujuste et bon, tous les hommes 4+6 c
60 Sont innocentsou, du moins, pardonnés. 4+6 d
J’espère en Dieu,je me moque du Diable. 4+6 a
Devant la Mortdebout dans mes rideaux, 4+6 b
Tout au reboursdu pauvre de la fable, 4+6 a
Je la prieraide décharger mon dos 4+6 b
65 Du poids des anset de tant de fardeaux. 4+6 b
Dans peu de jours,demain, ce soir, — qu’importe ? — 4+6 c
Son maigre doigtpeut frapper à ma porte ; 4+6 c
Ma malle est faiteet je suis préparé. 4+6 d
Donc, pour un bontestament, qu’on m’apporte 4+6 c
70 De l’encre frcheet du papier timbré. 4+6 d
Réglons d’abordmon convoi. Je souhaite 4+6 a
Qu’on le remarqueà peine en son parcours. 4+6 b
Car je n’eus pasd’orgueil, quoique poète. 4+6 a
Donc, mes amis,ni soldats ni tambours. 4+6 b
75 Nul apparat.Surtout point de discours. 4+6 b
Point d’orateurprenant le ton d’un prône 4+6 c
Et pleurnichantà froid — comme on rit jaune. 4+6 c
Si Mariavient me voir enterrer, 4+6 d
Tous ces vains mots —je sais ce qu’en vaut l’aune 4+6 c
80 M’empêcheraientde l’entendre pleurer. 4+6 d
Mais, dans la glaiseavant que je m’enlize 4+6 a
Sous un tombeaubien scellé de béton, 4+6 b
Menez, amis,mon cercueil à l’église. 4+6 a
N’y pas allerest de trop mauvais ton ; 4+6 b
85 Et puis, qui sait !peut-être y priera-t-on ? 4+6 b
Comme il est durde croire décevante 4+6 c
Une prièreingénue et fervente ! 4+6 c
Si jusqu’au Cieltout de même elle allait ?- 4+6 d
Il me plairaque ma vieille servante 4+6 c
90 Pour mon reposdise son chapelet. 4+6 d
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mètre profil métrique : 4+6
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