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COP_5/COP147
François COPPÉE
Sonnets intimes et Poèmes inédits
1925
DEUXIÈME PARTIE
POUR ÉLISE DUGUÉRET
POUR nous tous en qui l’art a mis son étincelle, 6+6 a
Le succès est souvent fragile et dure peu ; 6+6 b
Mais, vraiment, le Destin fut féroce pour celle 6+6 a
Qui, dans quelques instants, vous fera son adieu. 6+6 b
5 Comme une autre, elle était ardente et courageuse ; 6+6 a
Mais jamais le bonheur ne la prit par la main. 6+6 b
Et voici qu’elle atteint, la pâle voyageuse, 6+6 a
Lasse et les pieds en sang, le terme du chemin. 6+6 b
Fière, elle va, mais triste à donner froid dans l’âme ; 6+6 a
10 Et, dans la morne foule où nous la coudoyons, 6+6 b
Nous sommes étonnés que cette pauvre femme 6+6 a
Garde un pli de peplum, encor, dans ses haillons. 6+6 b
On fut l’artiste, hélas ! l’héroïne hautaine 6+6 a
Du drame ; on eut un nom, pour quelques soirs, vanté. 6+6 b
15 Et puis cela finit comme dans La Fontaine, 6+6 a
Et la cigale a faim, qui chanta tout l’été. 6+6 b
Vers quelque mort affreuse, ainsi, sombre et chagrine, 6+6 a
Elle allait, quand le sort plaça devant ses pas 6+6 b
Une femme au grand cœur, la bonne Séverine, 6+6 a
20 Qui, d’abord, a crié : « Cela ne se peut pas. » 6+6 b
Vite, elle a recueilli la mourante cigale 6+6 a
Dans la tiède chaleur de sa douce amitié. 6+6 b
Et nous tous, accourus à sa voix musicale, 6+6 a
Nous joignons notre effort sincère à sa pitié. 6+6 b
25 Grands et petits, obscurs ou fameux, tous, en masse, 6+6 a
Pour faire un peu de bien, nous nous réunissons. 6+6 b
— Chanteuse, j’ai ma voix. — Bouffon, j’ai ma grimace. 6+6 a
Nous voici tous ! Voici nos vers et nos chansons ! 6+6 b
Quant à la récompense, oh ! que chacun l’obtienne ! 6+6 a
30 Elle sera, pour nous, dans cette fête d’art, 6+6 b
Les larmes de bonheur que la tragédienne, 6+6 a
En vous disant : Merci ! répandra sur son fard. 6+6 b
mètre profil métrique : 6+6
forme globale type : suite périodique
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