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| = césure
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Alfred BUSQUET
POÉSIES
1884
POÉSIES DOMESTIQUES
LE ROUET
Quatre-vingts ans avaient sonné pour notre tante. 6+6 a
Riche de ses vertus et de son sort contente, 6+6 a
Elle jetait encore, âme de la maison. 6+6 b
Son pain dur aux oiseaux, au logis sa chanson. 6+6 b
5 Elle avait recueilli dans sa robe de bure 6+6 a
Treize petits-neveux, son orgueil, sa parure, 6+6 a
Et fille, elle gardait pour les hymens du ciel 6+6 b
La fleur de son sourire aussi doux que le miel. 6+6 b
Cinquante écus de rente et son toit pour patrie. 6+6 a
10 Pour blason, trois cents ans de paysannerie ; 6+6 a
Noble blason signé sur les vitraux pieux 6+6 b
De l’église, et donnés jadis par les aïeux. 6+6 b
Un jardin exigu, la santé, la prière 6+6 a
Et son rouet, rendaient sa vieillesse prospère. 6+6 a
15 Comme elle était joyeuse alors que le printemps 6+6 b
Fleurissait la prairie et ses quatre-vingts ans. 6+6 b
Et qu’une bonne odeur de foin et d’algue verte 6+6 a
Lui venait de la mer par la fenêtre ouverte ! 6+6 a
Alors elle appelait tous ses petits-neveux, 6+6 b
20 Démons charmans, toujours se disputant entre eux, 6+6 b
Et de son superflu, prodigue outre mesure. 6+6 a
Les bourrait de gâteaux, de noix, de confitures. 6+6 a
Puis, les ayant rangés en cercle, leur chantait. 6+6 b
En tremblotant un peu, la chanson du Rouet : 6+6 b
25 Tourne, rouet, tourne, quenouille ! 8 a
Tourne, bobine, allègrement, 8 b
Et sous mon vieux doigt qui te mouille. 8 a
Lin, fais-nous un chaud vêtement. 8 b
Tandis que l’horizon flamboie. 8 c
30 Que monte le soleil d’été. 8 d
Avec du pain et la santé. 8 d
Je file, et mon cœur est en joie ! 8 c
Tourne, rouet, tourne toujours. 8 a
Avec le lin file mes jours ! 8 a
35 Roulant ses eaux et la lumière. 8 a
Le fleuve a des bruits si charmans ! 8 b
Il chante aux pieds de la chaumière 8 a
Où coulent mes quatre-vingts ans. 8 b
De peur que la fauvette étouffe, 8 c
40 Pour que le pinson soit au frais, 8 d
L’églantier fleurit tout exprès. 8 d
Et le sureau blanchit sa touffe. 8 c
Tourne, rouet, tourne toujours. 8 a
Avec le lin file mes jours ! 8 a
45 Le ramier gémit dans les chênes 8 a
Et répète aux échos son deuil. 8 b
Les corneilles mangent les faînes. 8 a
Le linot tient tête au bouvreuil ; 8 b
Le râle court dans la prairie, 8 c
50 La bécassine nous revient. 8 d
L’hirondelle qui se souvient 8 d
A ma fenêtre pour patrie. 8 c
Tourne, rouet, tourne toujours. 8 a
Avec le lin file mes jours ! 8 a
55 Je n’ai pas une grande peine 8 a
A voir mes ans tôt écoulés ; 8 b
Lorsque de pain la huche est pleine. 8 a
Tous mes ennuis sont refoulés. 8 b
Les fleurs, les oiseaux, la famille. 8 c
60 Suffisent à dorer mon sort : 8 d
Je vends mes toiles, pauvre fille. 8 c
N’en gardant qu’une pour la mort. 8 d
Tourne, rouet, tourne toujours. 8 a
Avec le lin file mes jours ! 8 a
mètre profils métriques : 8, 6+6
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