Métrique en Ligne
P = préposition
C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
BRI_2/BRI85
Auguste BRIZEUX
LA FLEUR D’OR
1874
LIVRE QUATRIÈME
A FLORENCE
À ma Mère en Italie
ELLE voulut partir, | malgré le poids des ans, 6+6 a
Pour suivre en Italie | un de ses chers enfants, 6+6 a
Cœur d’or, solide esprit, | mais faible créature, 6+6 b
Et que l’art confiait | aux mains de la nature. 6+6 b
5 En vain lui disait-on : | « C’est trop loin. — Non, j’irai. 6+6 a
S’il part d’ici sans moi, | seule ici, j’en mourrai. 6+6 a
Est-ce trop de nous deux | (une mère, une femme). 6+6 b
Pour bien soigner son corps, | pour réjouir son âme ? 6+6 b
Et puis, vous le savez, | j’ai là mon autre fils, 6+6 a
10 Que le soleil retient | aussi dans ce pays, 6+6 a
Le premier-né d’eux tous, | ma ressemblance même, 6+6 b
Pauvre chanteur errant | qui me fuit, mais qui m’aime. 6+6 b
Ah ! tout mon cœur se trouble ! |… Allons, pas de refus ! 6+6 a
Je me fais vieille, hélas ! | ne le verrai-je plus ? » 6+6 a
15 Et tu suivis ton cœur, | qui seul te persuade, 6+6 b
Pour voir ton fils absent | et voir ton fils malade. 6+6 b
Oh ! dans l’hôtel de Gêne | et dans cet escalier, 6+6 a
Quand tu me rencontras | au détour du palier, 6+6 a
Oh ! comme tu m’ouvris | tes bras, et quelles larmes 6+6 b
20 Sortirent de nos yeux | toutes pleines de charmes, 6+6 b
Si bien que, près de nous, | sans oser se montrer. 6+6 a
Un serviteur pleurait | en nous voyant pleurer ! 6+6 a
Mais bientôt nous voilà | tous quatre par la ville ; 6+6 b
Moi, dans ces murs brillants | de leur gloire civile, 6+6 b
25 Guide joyeux et fier, | en passant je nommais 6+6 a
Tous ces monceaux de marbre | appelés des palais ; 6+6 a
Et je voyais ton corps, | courbé par le voyage, 6+6 b
Se dresser, et la joie | éclairer ton visage. 6+6 b
Tout ce qu’a de plus grand | ou la nature ou l’art, 6+6 a
30 Tout aura donc brillé | sous tes yeux, bien que tard : 6+6 a
Spectacle inespéré, | merveilles inouïes, 6+6 b
Que tu pourras longtemps | conter à tes amies, 6+6 b
Quand vous prenez le frais | au bord du grand chemin, 6+6 a
Ou, durant les chaleurs, | sur le banc du jardin. 6+6 a
35 Dans Gêne et dans Florence | ainsi quelques semaines 6+6 b
Passèrent, jours heureux | pourtant mêlés de peines, 6+6 b
Car chaque heure disait | qu’il faudrait se quitter ; 6+6 a
Et je vous vis un soir | en voiture monter. 6+6 a
O moment du départ, | baisers, adieu suprême ! 6+6 b
40 Odieuse voiture | emportant ce qu’on aime, 6+6 b
Et qui vous laisse seul ! | Puis l’on va dans un coin 6+6 a
Tomber sur une pierre | et pleurer sans témoin !… 6+6 a
Aujourd’hui, de retour | dans ta ville bretonne, 6+6 b
Quand tu passes, plus d’un | se retourne et s’étonne : 6+6 b
45 « A son âge, partir ! | » Or, dans notre cité, 6+6 a
Pour un exploit moins grand, | jeune, on serait cité ; 6+6 a
Par ce pieux voyage | une noble couronne 6+6 b
S’ajoute à l’humble éclat | qui déjà t’environne ; 6+6 b
Car si quelque chanteur, | des amis du dessin, 6+6 a
50 Tous des enfants de l’art, | sortirent de ton sein, 6+6 a
On dit : « Voici la mère ! | » Oui, même les merveilles 6+6 b
Qui, le jour, m’inspirant, | la nuit charment mes veilles, 6+6 b
Ont doublé de douceurs ; | toujours s’en vont mes pas 6+6 a
Où nous allions, ton bras | appuyé sur mon bras ; 6+6 a
55 Et dans les grands palais | la riche galerie, 6+6 b
Dans l’église où pour moi | tu priais attendrie, 6+6 b
Partout me rappelant | ton cœur pur et ton goût, 6+6 a
Ma mère, je te vois | et je te suis partout. 6+6 a
mètre profil métrique : 6+6
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