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BRI_2/BRI66
Auguste BRIZEUX
LA FLEUR D’OR
1874
LIVRE DEUXIÈME
A PARIS
À E.
I
LE jour naît : dans les prés et sous les taillis verts 6+6 a
Allons, allons cueillir et des fleurs et des vers, 6+6 a
Tandis que la ville repose ; 8 b
La fleur ouvre au matin plus de pourpre et d’azur, 6+6 c
5 Et le vers, autre fleur, s’épanouit plus pur 6+6 c
À l’aube humide qui l’arrose. 8 b
Que de fleurs ont passé qu’on n’a point su cueillir ! 6+6 a
Sur sa tige oubliée, ah ! ne laissons vieillir 6+6 a
Aucune des fleurs de ce monde. 8 b
10 Allons cueillir des fleurs ! par un charme idéal. 6+6 c
Qu’avec l’encens des vers leur parfum matinal 6+6 c
Amoureusement se confonde. 8 b
Allons cueillir des vers ! sous la fleur du buisson 6+6 a
Entendez-vous l’oiseau qui chante sa chanson ? 6+6 a
15 Tout chante et fleurit, c’est l’aurore ! 8 b
Je veux chanter aussi : blonde fille du ciel. 6+6 c
Ainsi de fleur en fleur va butinant son miel 6+6 c
L’abeille joyeuse et sonore. 8 b
Cueillons des fleurs ! Et puis, heureux de mon fardeau, 6+6 a
20 Je reviendrai m’asseoir prés du léger rideau 6+6 a
Qui voile encor ma bien-aimée, 8 b
Et, du bruit de mes vers dissipant son sommeil, 6+6 c
Je ferai sur ses yeux et sur son front vermeil 6+6 c
Tomber une pluie embaumée. 8 b
25 Riante et mollement soulevée à demi, 6+6 a
Je veux que de mes fleurs sur son front endormi 6+6 a
Sa blanche main suive la trace ; 8 b
Et qu’en un doux silence admirant leurs couleurs, 6+6 c
Elle doute longtemps qui, des vers ou des fleurs, 6+6 c
30 Ont plus de fraîcheur et de grâce. 8 b
II
Mes rustiques habits étaient là dans la chambre, 6+6 a
Costume sauvage et brillant : 8 b
Je songeais en les déployant 8 b
Aux lieux qui m’ont vu jeune, aux retours en septembre. 6+6 a
35 Elle, toute au présent, riait de mes soucis ; 6+6 a
Ou sur mon passé, chose éteinte, 8 b
Revenant légère et sans crainte 8 b
(Mais s’abusant peut-être), écoutait mes récits. 6+6 a
Souvent les fruits lointains sont plus doux, bien qu’étrange 6+6 a
40 Au cœur d’un autre on aime à voir, 8 b
À doubler par lui son savoir : 8 b
Notre esprit curieux se plaît à ces échanges. 6+6 a
J’écoute, disait-elle ; allons, barde, chantez ! » 6+6 a
Et, le front penché sur la glace, 8 b
45 Elle rattachait avec grâce 8 b
Ses cheveux, noirs bandeaux sur ses tempes jetés. 6+6 a
III
En elle je n’aimai d’abord que la beauté, 6+6 a
La bouche humide et fraîche ouverte à la gté, 6+6 a
Et l’or bruni de ses épaules, 8 b
50 Et les frêles contours de ce corps souple et fin 6+6 c
Qui plie à chaque pas, comme à l’air du matin 6+6 c
Le long des eaux tremblent les saules. 8 b
J’ai connu la beauté ! que m’importait alors 6+6 a
Si nulle âme, en parlant, n’animait ce beau corps, 6+6 a
55 Ces longues paupières d’Arabe ? 8 b
Heureux de respirer ce souffle virginal, 6+6 c
Ou d’écouter, rêveur, de sa voix de cristal 6+6 c
Tomber quelque molle syllabe. 8 b
Pardon, si tu le peux ! à tes genoux, pardon ! 6+6 a
60 Lorsque, le cœur brisé, pâle et dans l’abandon, 6+6 a
Plus faible que toi, faible femme. 8 b
Je vins tout éplo te dire mes douleurs, 6+6 c
Ta secrète beau s’éveilla sous mes pleurs. 6+6 c
Et tu me révélais ton âme. 8 b
65 O larmes ! ô soupirs ! ô mystères d’amour ! 6+6 a
Femmes, pour nous charmer, vous avez tour à tour 6+6 a
La beauté visible et cachée ; 8 b
Êtres deux fois doués ! Êtres puissants et doux ! 6+6 c
Vous domptez notre force ; elle marche après vous 6+6 c
70 D’un double lien attachée. 8 b
IV
Ah ! dis-moi, jeune femme, autour de ta demeure 6+6 a
N’entends-tu pas de voix qui pleure ? 8 a
Comme moi tu perdis le rire aux ailes d’or ; 6+6 b
Mais ton crédule espoir l’appelle-t-il encor ? 6+6 b
75 Heureuse d’espérer !Après un long silence, 6+6 a
Lorsqu’un hymne en secret de mon âme s’élance, 6+6 a
Ce n’est plus vers mes jours de printemps et de fleurs 6+6 b
C’est assez d’écarter de moi l’ange des pleurs, 6+6 b
Cet ange toujours pâle et toujours lamentable 6+6 a
80 Qui pleure à mon chevet et qui pleure à ma table. 6+6 a
Mais si le rire ai rentre dans ma maison. 6+6 b
Si l’été qui fleurit sèche sous un rayon 6+6 b
Mes larmes, tu verras la chanteuse alouette 6+6 a
Envier dans le ciel ma voix qu’on dit muette, 6+6 a
85 Les bardes, s’éveillant, diront : « C’est lui ! c’est lui ! » 6+6 b
Et les tranquilles eaux du Leff… Mais aujourd’hui ! 6+6 b
Ah ! dis-moi, jeune et douce femme, 8 a
N’entends-tu pas des voix qui pleurent dans ton âme ? 6+6 a
V
Si je viens à passer, sur ton front, en tremblant. 6+6 a
90 Hélas ! n’abaisse pas ainsi ton voile blanc, 6+6 a
Toute pâle et toute troublée ; 8 b
Au bras qui te conduit n’attache plus ton bras ; 6+6 c
Comme pour m’éviter, ne presse plus tes pas 6+6 c
Vers quelque solitaire allée. 8 b
95 Eh bien ! si ma rencontre importune tes yeux, 6+6 a
Parle avec confiance et décide en quels lieux 6+6 a
Il faut pour toi que je m’exile ; 8 b
Ton amour fut ma paix, mon bonheur, mon soutien, 6+6 c
Qu’aujourd’hui mon repos ne trouble plus le tien ; 6+6 c
100 Commande, je serai docile. 8 b
Alors tes yeux ternis reprendront leur azur, 6+6 a
Le jour comme autrefois ntra limpide et pur, 6+6 a
La nuit s’écoulera sans fièvre ; 8 b
Tu t’abandonneras à ta sécurité. 6+6 c
105 Et l’innocence aimable et la douce g 6+6 c
Souriront encor sur ta lèvre. 8 b
Dis un mot et je pars. — Sans trop d’ennuis pour toi, 6+6 a
Si je puis cependant demeurer, souffre-moi ; 6+6 a
Et, lorsque au détour d’une rue 8 b
110 Tout à coup devant toi m’offrira le hasard, 6+6 c
Passe libre et sans peur, ne crains pas mon regard ; 6+6 c
Je ne t’aurai pas reconnue. 8 b
Seulement (je t’en prie !), oh ! quand tu seras loin, 6+6 a
Quand je pourrai braver et soupçons et témoin, 6+6 a
115 Vers toi que je tourne la tête. 8 b
Pour observer encor ton pas modeste et lent, 6+6 c
El tout ce qu’à mon cœur ce marcher indolent 6+6 c
Rappelle de grâce secrète. 8 b
Alors, alors mon cœur bondira ! mille accords, 6+6 a
120 Mille vœux dans mou cœur retentiront alors. 6+6 a
Et se répandront sur ta route ; 8 b
Et mille illusions, mille prospérités, 6+6 c
Comme des anges purs iront à tes côtés. 6+6 c
Ce jour-là, si le ciel m’écoute ! 8 b
mètre profils métriques : 8, 6+6
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