Métrique en Ligne
P = préposition
C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
BRI_2/BRI63
Auguste BRIZEUX
LA FLEUR D’OR
1874
LIVRE DEUXIÈME
A PARIS
Jacques le Maçon
I
LE MARI.
ADIEU, mes bons petits. | Toi, plus frais qu’une pomme, 6+6 a
Mon Paul, un gros baiser. | Encore un ! encore un ! 6+6 b
Femme, entre vos deux bras | serrez donc mieux votre homme : 6+6 a
Songez que jusqu’au soir | je vais rester à jeun. 6+6 b
LA FEMME.
5 Vous, Vincent, veillez mieux | sur vos échafaudages, 6+6 a
Ah ! pour me mettre en deuil | il suffit d’un faux pas. 6+6 b
Enfoncez bien vos pieux, | nouez bien vos cordages. 6+6 a
Vraiment le long du jour | ici je ne vis pas. 6+6 b
LE MARI.
La bâtisse s’achève ; | avec notre ami Jacques 6+6 a
10 Bientôt je reviendrai, | nous serons joyeux tous : 6+6 b
Du vin, un bon rôti, | des œufs rouges de Pâques ! 6+6 a
Tu sais, Jacques, tu sais | que ta place est chez nous. 6+6 b
II
Courage ! encore une journée, 8 a
Et cette reine des maisons 8 b
15 Dans Paris sera terminée ; 8 a
Courage, apprentis et maçons ! 8 b
Avec leurs marteaux, leurs truelles, 8 a
Et des gravats plein leurs paniers. 8 b
Comme ils sont vifs sur leurs échelles ! 8 a
20 Moins vifs seraient des mariniers. 8 b
Qu’on prépare un bouquet de fête : 8 a
Au pignon il faut le planter. 8 b
Les plumes au vent, sur le faite, 8 a
Voyez-vous le moineau chanter ? 8 b
25 Eux, ce soir, les gars de Limoge, 8 a
Du travail chanteront la fin ; 8 b
Et vous entendrez votre éloge. 8 a
Bourgeois, si vous payez le vin. 8 b
III
LA FEMME.
Sainte mère du Christ, | vous êtes mon refuge, 6+6 a
30 Le matin je vous prie | et le soir derechef ! 6+6 b
Des frayeurs d’une femme, | hélas ! vous êtes juge, 6+6 a
Vous-même avez tremblé | pour votre bon Joseph. 6+6 b
Comme moi, vous n’aviez, | recours des indigentes, 6+6 a
Que les deux bras du saint | appelé votre époux, 6+6 b
35 Au risque de ses jours | élevant des charpentes, 6+6 a
Construisant des maisons | qui n’étaient pas pour vous. 6+6 b
Mais votre esprit veillait ! | Moi, faible et presque morte, 6+6 a
Que puis-je pour celui | qui me donne ses jours ? 6+6 b
Vierge, comme son corps | rendez son âme forte ; 6+6 a
40 Dans ses hardis travaux | soutenez-le toujours. 6+6 b
IV
Dieu ! quelle rumeur sur la place ! 8 a
« À l’aide, à l’aide, Limousins ! 8 b
Du foin, de la paille ! oh ! de grâce. 8 a
Des matelas et des coussins ! 8 b
45 « Si l’un à cette pierre blanche 8 a
Peut s’accrocher, ils sont sauvés… 8 b
Ah ! tous deux font craquer la planche ! 8 a
Ils vont tomber sur les pavés. » 8 b
Et vers l’étai qui se balance, 8 a
50 Tous restent là, les bras en haut ; 8 b
Alors, dans le morne silence, 8 a
On entendit sur l’échafaud : 8 b
« J’ai trois enfants, Jacque, une femme ! 8 a
Jacque un instant le regarda : 8 b
55 « C’est juste ! » dit cette bonne âme, 8 a
Et dans la rue il se jeta. 8 b
V
Ah ! ton nom, ton vrai nom, | que ma voix le répande, 6+6 a
Toi que j’appelai Jacque, | ô brave compagnon ! 6+6 b
Inconnu, qui portais | une âme douce et grande. 6+6 a
60 Pour l’honneur du pays, | héros, dis-moi ton nom ! 6+6 b
Sommes-nous au-dessous | des temps de barbarie ? 6+6 a
Les tiens dans ton hameau | ne t’ont point rapporté ! 6+6 b
Ils ne t’ont point nommé | saint de leur confrérie ! 6+6 a
Les rimeurs se sont tus ! | l’orgue n’a point chanté ! 6+6 b
65 Des amis, un surtout, | pleurant sur ton cadavre, 6+6 a
Quelques mots du journal, | voilà ton seul honneur : 6+6 b
Honte à qui voit le mal | sans que le mal le navre, 6+6 a
Ou qui, voyant le bien, | n’est ivre de bonheur ! 6+6 b
mètre profils métriques : 8, 6+6
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