Métrique en Ligne
P = préposition
C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
BRI_1/BRI9
Auguste BRIZEUX
Marie
1831
LE BARDE
Morne et seul, je passais | mes jours à m'attrister, 6+6 a
Mais l'esprit du pays | m'est venu visiter, 6+6 a
Et le son de sa voix | semblait le chant des brises 6+6 b
Qui sifflent dans la lande | aux bords des pierres grises. 6+6 b
5 Il dit : « je fus un barde, | et l'on me chante encor. 6+6 a
Cette colline verte | au-dessous de Ker-Rorh 6+6 a
Est ma tombe. À ses pieds | le torrent se déchaîne. 6+6 b
Là, durant les chaleurs, | sous les branches d'un chêne, 6+6 b
Un vieux prêtre chrétien | souvent venait s'asseoir ; 6+6 a
10 Et toi, qui par la main | guidais cet homme noir, 6+6 a
Enfant, tu t'asseyais | près de lui sur la mousse, 6+6 b
Et tu lisais alors | d'une voix calme et douce. 6+6 b
D'un sage et vieux druide, | ainsi, dans la forêt, 6+6 a
Disciple, je suivis | l'enseignement secret. 6+6 a
15 J'ai redit vos discours | aux esprits des bruyères ; 6+6 b
Et ceux des bois taillis, | des étangs, des rivières, 6+6 b
Quand ton livre s'ouvrait, | volaient en tourbillons : 6+6 a
On eût dit sous le chêne | un essaim de frelons, 6+6 a
Tant arrivaient d'esprits, | d'ombres et d'âmes folles 6+6 b
20 Pour recueillir le miel | des savantes paroles. 6+6 b
On t'aimait. À la nuit, | quand par le bois d'élô 6+6 a
Tu revenais au bourg, | des touffes de bouleau 6+6 a
Entendais-tu sortir | des plaintes étouffées ? 6+6 b
Ces plaintes, cher enfant, | étaient celles des fées : 6+6 b
25 C'étaient leurs cris d'amour, | leurs chants grêles, leurs vœux 6+6 a
Car plusieurs te suivaient | en baisant tes cheveux, 6+6 a
Et quand l'une dans l'air | déployait son écharpe 6+6 b
Tous les bardes chantaient | inclinés sur la harpe. 6+6 b
« Cette nuit, le jeune homme | est triste ; la cité 6+6 a
30 Le retient dans ses murs | comme en captivité ; 6+6 a
Seul près de son foyer, | voyant le bois qui fume, 6+6 b
Il pense au sombre Arvor | tout entouré de brume, 6+6 b
Il entend la mer battre | au pied de Log-Onâ, 6+6 a
Et la nue en pleurant | passer sur Comanâ. 6+6 a
35 Jeune homme, dans ton cœur | ainsi tu te désoles ; 6+6 b
Mais Paris, c'est le lieu | des arts et des écoles, 6+6 b
Ici toute science | a ses temples ouverts ; 6+6 a
Et l'Armorique, hélas ! | N'a plus que ses bois verts. 6+6 a
Rejeton du passé, | barde, notre espérance, 6+6 b
40 Reste encore et grandis | dans ces villes de France ! 6+6 b
L'esprit de ton pays | viendra te visiter. 6+6 a
Quand ton cœur est trop plein, | laisse ton cœur chanter. 6+6 a
« Adieu ! L'ombre pâlit. | Sur tes vitres mouillées 6+6 b
Comme le vent se plaint ! | Bruyantes et gonflées, 6+6 b
45 Les sources vers la mer | vont dégorger leurs eaux, 6+6 a
Et les rocs de Penn-Marcʼh | déchirent les vaisseaux : 6+6 a
Par tes vers, ô chrétien ! | Calme donc ces flots sombres, 6+6 b
Car le Christ a ravi | leur force aux anciens nombres. » 6+6 b
mètre profil métrique : 6+6
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