Métrique en Ligne
P = préposition
C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
BRI_1/BRI40
Auguste BRIZEUX
Marie
1831
MARIE (10)
Partout des cris de mort et d'alarme ! Paris 6+6 a
S'entoure avec effroi de ses jeunes conscrits, 6+6 a
Et du Nord, du Midi, des champs de la Lorraine, 6+6 b
Des jardins verdoyants de la riche Touraine, 6+6 b
5 Tous, enfants bien-aimés, déjà près d'être époux, 6+6 a
Accourent à grands pas au commun rendez-vous. 6+6 a
Sur l'habit du pays, qu'ils conservent encore, 6+6 b
Plus d'un porte une fleur, et tous, avant l'aurore, 6+6 b
Par bandes s'avançant aux deux bords du chemin, 6+6 a
10 Disent des chants de guerre en se tenant la main. 6+6 a
Liberté, seul amour que notre âme flétrie 6+6 b
Sente et poursuive encore avec idolâtrie, 6+6 b
De ce siècle sans foi seule divinité, 6+6 a
Regarde, à ton seul nom, regarde avec fierté 6+6 a
15 Se lever cette foule ardente, généreuse ! 6+6 b
Dans tes prédictions si tu n'es point menteuse, 6+6 b
Quels biens, ô liberté ! Pourras-tu donc offrir 6+6 a
À ces nouveaux croyants qui pour toi vont mourir ? 6+6 a
Il faut partir aussi, Daniel ! Adieu ta ferme 6+6 b
20 Qu'un fossé large et creux contre les loups enferme, 6+6 b
Ton hameau recouvert d'un bois de châtaignier, 6+6 a
Et tes beaux champs de seigle ! Adieu, jeune fermier ! 6+6 a
Lorsqu'au lever du jour, joyeux, plein de courage, 6+6 b
Monté sur tes chevaux tu sortais pour l'ouvrage, 6+6 b
25 Avec toutes ses voix l'harmonieux matin 6+6 a
S'éveillait en chantant à l'horizon lointain : 6+6 a
Le noir Ellé d'abord, ou le Scorf à ta droite 6+6 b
Roulant ses claires eaux dans sa vallée étroite ; 6+6 b
Et, tel qu'un doux parfum, le chant de mille oiseaux 6+6 a
30 S'élevant du vallon avec le bruit des eaux ; 6+6 a
La brise dans les joncs, qui siffle et les caresse ; 6+6 b
Puis l'appel matinal de la première messe, 6+6 b
Répété tour à tour, comme un salut chrétien, 6+6 a
Du clocher de Cléguer à celui de Kérien. — 6+6 a
35 Adieu, Daniel ! Adieu le bourg, l'église blanche ! 6+6 b
Adieu ton beau pays ! Après vêpres, dimanche, 6+6 b
Tes amis te verront pour la dernière fois, 6+6 a
Et tu cacheras mal tes larmes sous tes doigts ; 6+6 a
Car pour nous rien ne vaut notre vieille patrie, 6+6 b
40 Et notre ciel brumeux, et la lande fleurie ! 6+6 b
Mais avant de partir, si tu le peux, va voir 6+6 a
Celle qui demeurait chez sa mère au Moustoir, 6+6 a
Comme si tu voulais, avant ton grand voyage, 6+6 b
Visiter tes amis de village en village. 6+6 b
45 Assis dans sa maison, alors regarde bien 6+6 a
Si quelque joie y règne, et s'il n'y manque rien, 6+6 a
Si son époux est bon, sa famille nombreuse, 6+6 b
Et si dans son ménage enfin elle est heureuse. 6+6 b
Regarde chaque objet pour me les dire un jour, 6+6 a
50 Et que dans ton récit je les voie à mon tour. 6+6 a
Attache bien tes yeux sur cette pauvre femme. 6+6 b
Est-elle belle encor comme au fond de mon âme ? 6+6 b
Et ses petits enfants, prends-les entre tes bras, 6+6 a
Et s'ils ont de ses traits tu les caresseras. 6+6 a
55 Tu lui diras enfin (et toujours, je t'en prie, 6+6 b
Garde, en parlant, tes yeux attachés sur Marie), 6+6 b
Que tu pars, devenu soldat de métayer, 6+6 a
Que tu vas à Paris ; et, feignant de railler, 6+6 a
Tu lui demanderas si d'une ardeur fidèle, 6+6 b
60 Dans la grand'ville, ici, nul ne languit loin d'elle ; 6+6 b
Puis, revenant encore à ton prochain départ, 6+6 a
Dis-lui : « n'aura-t-il pas un mot de votre part ? » 6+6 a
— Oh ! S'il croît une fleur, une feuille à sa porte, 6+6 b
Daniel, prends-les pour moi ! Déjà sèches, qu'importe ! 6+6 b
mètre profil métrique : 6+6
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