Métrique en Ligne
P = préposition
C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
BRI_1/BRI24
Auguste BRIZEUX
Marie
1831
LE MOIS D'AOÛT
ô mes frères, voici le beau temps des vacances, 6+6 a
Le mois d'août, appelé par dix mois d'espérances ! 6+6 a
De bien loin votre aîné, je ne puis oublier 6+6 b
Août et ses jeux riants ; alors, pauvre écolier, 6+6 b
5 Je veux voir mon pays, notre petit domaine ; 6+6 a
Et toujours le mois d'août au logis nous ramène, 6+6 a
Tant un cœur qui nourrit un regret insensé, 6+6 b
Un cœur tendre s'abuse et vit dans le passé ! 6+6 b
Voici le beau mois d'août : en courses, camarades ! 6+6 a
10 La chasse le matin, et le soir les baignades ! 6+6 a
Vraiment, pour une année, à peine nos parents 6+6 b
Nous ont-ils reconnus : vous si forts et si grands, 6+6 b
Moi courbé, moi pensif. — ô changements contraires ! 6+6 a
La jeunesse vous cherche, elle me fuit, mes frères ; 6+6 a
15 Gaîment vous dépensez vos jours sans les compter, 6+6 b
Économe du temps je voudrais l'arrêter. — 6+6 b
Mais aux pierres du quai déjà la mer est haute : 6+6 a
Toi, mon plus jeune frère, allons ! Gagnons la côte ; 6+6 a
En chemin par les blés tu liras tes leçons, 6+6 b
20 Ou bien tu cueilleras des mûres aux buissons. 6+6 b
Hâtons-nous ! Le soleil nous brûle sur ces roches ! 6+6 a
Ne sens-tu pas d'ici les vagues toutes proches ? 6+6 a
Et la mer ! L'entends-tu ? Vois-tu tous ces pêcheurs ? 6+6 b
N'entends-tu pas les cris et les bras des nageurs ? 6+6 b
25 Ah ! Rendez-moi la mer et les bruits du rivage : 6+6 a
C'est là que s'éveilla mon enfance sauvage ; 6+6 a
Dans ces flots, orageux comme mon avenir, 6+6 b
Se reflètent ma vie et tout mon souvenir ! 6+6 b
La mer ! J'aime la mer mugissante et houleuse, 6+6 a
30 Ou, comme en un bassin une liqueur huileuse, 6+6 a
La mer calme et d'argent ! Sur ses flancs écumeux 6+6 b
Quel plaisir de descendre et de bondir comme eux, 6+6 b
Ou, mollement bercé, retenant son haleine, 6+6 a
De céder comme une algue au flux qui vous entraîne ! 6+6 a
35 Alors on ne voit plus que l'onde et que les cieux, 6+6 b
Les nuages dorés passant silencieux, 6+6 b
Et les oiseaux de mer, tous allongeant la tête 6+6 a
Et jetant un cri sourd en signe de tempête 6+6 a
ô mer, dans ton repos, dans tes bruits, dans ton air, 6+6 b
40 Comme un amant, je t'aime ! Et te salue, ô mer ! 6+6 b
Assez, assez nager ! L'ombre vient, la mer tremble ; 6+6 a
Contre les flots, mon frère, assez lutter ensemble ! 6+6 a
Retrempés dans leur sel, assouplis et nerveux, 6+6 b
Partons ! Le vent du soir séchera nos cheveux. 6+6 b
45 Quelle joie en rentrant, mais calme et sans délire, 6+6 a
Quand, debout sur la porte et tâchant de sourire, 6+6 a
Une mère inquiète est là qui vous attend, 6+6 b
Vous baise sur le front, et pour vous à l'instant 6+6 b
Presse les serviteurs, quand le foyer pétille, 6+6 a
50 Et que nul n'est absent du repas de famille ! 6+6 a
Monotone la veille, et vide, la maison 6+6 b
S'anime : un rayon d'or luit sur chaque cloison ; 6+6 b
Le couvert s'élargit ; comme des fruits d'automne, 6+6 a
D'enfants beaux et vermeils la table se couronne ; 6+6 a
55 Et puis mille babils, mille gais entretiens, 6+6 b
Un fou rire, et souvent de longs pleurs pour des riens. 6+6 b
Mais plus tard, lorsqu'on touche aux soirs gris de septembre, 6+6 a
En cercle réunis dans la plus grande chambre, 6+6 a
C'est alors qu'il est doux de veiller au foyer ! 6+6 b
60 On roule près du feu la table de noyer, 6+6 b
On s'assied ; chacun prend son cahier, son volume ! 6+6 a
Grand silence ! On n'entend que le bruit de la plume, 6+6 a
Le feuillet qui se tourne, ou le châtaignier vert 6+6 b
Qui craque, et l'on se croit au milieu de l'hiver. 6+6 b
65 Les yeux sur ses enfants, et rêveuse, la mère 6+6 a
Sur leur sort à venir invente une chimère, 6+6 a
Songe à l'époux absent depuis la fin du jour, 6+6 b
Et prend garde que rien ne manque à son retour. 6+6 b
L'aïeule cependant sur sa chaise se penche, 6+6 a
70 Et devant le seigneur courbe sa tête blanche. 6+6 a
Écoutez-la, seigneur, et pour elle, et pour nous ! 6+6 b
Cette femme, ô mon dieu, qui vous prie à genoux, 6+6 b
Ne la repoussez pas ! Soixante ans à la gêne, 6+6 a
Et toujours courageuse, elle a porté sa chaîne : 6+6 a
75 Une heure de repos avant le grand sommeil ! 6+6 b
Avant le jour sans fin, quelques jours au soleil ! 6+6 b
mètre profil métrique : 6+6
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