Métrique en Ligne
BRI_1/BRI14
Auguste BRIZEUX
Marie
1831
LE CHEMIN DU PARDON
UN JEUNE HOMME
Où courez-vous ainsi, pieuses jeunes filles, 6+6 a
Qui passez deux à deux sous vos coiffes gentilles ? 6+6 a
Ce tablier de soie et ce riche cordon 6+6 b
Disent que vous allez toutes quatre au pardon. 6+6 b
UNE JEUNE FILLE
5 Laissez-nous, laissez-nous poursuivre notre route, 6+6 a
Jeunes gens ! Nous allons où vous allez sans doute ; 6+6 a
Et ces bouquets de mil au bord de vos chapeaux 6+6 b
Disent assez pourquoi vous vous faites si beaux. 6+6 b
UN JEUNE HOMME
Eh bien ! Tout en causant, Gaït, si bon vous semble, 6+6 a
10 Jusqu'à Saint-Matelinn nous marcherons ensemble ; 6+6 a
Et de même en causant nous reviendrons ce soir. 6+6 b
Mes yeux sont réjouis, Gaït, de vous revoir. 6+6 b
UNE JEUNE FILLE
Non ! Suivez votre route, et nous suivrons la nôtre. 6+6 a
D'un côté les garçons, et les filles de l'autre. 6+6 a
15 Vous nous retrouverez aux marches de la croix, 6+6 b
Et nos galants alors nous donneront des noix. 6+6 b
Aux environs de Scaer, ainsi, dans une lande, 6+6 a
D'amoureux pèlerins devisait une bande : 6+6 a
C'étaient Berthel, Jérôme, enfant modeste et fin, 6+6 b
20 Qui, lorsqu'il sert la messe, a l'air d'un séraphin ; 6+6 b
Anna des bois du Lorth était aussi du nombre, 6+6 a
Et Loïc, qui la suit partout comme son ombre. 6+6 a
Moi-même à ce pardon j'allais vêtu comme eux ; 6+6 b
Pourtant à mon costume il manquait les cheveux, 6+6 b
25 Si bien qu'en traversant cette lande embaumée ; 6+6 a
« Quel est donc celui-ci qui revient de l'armée ? 6+6 a
Disaient tout bas les gens. À sa taille, à son air, 6+6 b
C'est celui qui partit pour Ronan, l'autre hiver. 6+6 b
— Eh ! Non ! C'est le jeune homme arrivé de la ville. 6+6 a
30 À parler notre langue on dit qu'il est habile. 6+6 a
Bonjour, monsieur ! Et Dieu vous garde du chagrin ! 6+6 b
Vous ne méprisez pas ceux qui sèment le grain. » 6+6 b
D'autres d'un air joyeux reprenaient : « quelle somme, 6+6 a
Pour travailler aux champs, demandez-vous, jeune homme ? » 6+6 a
35 Nous avancions toujours, et par tous les sentiers 6+6 b
Ce n'étaient que chapeaux, coiffes et tabliers, 6+6 b
Allant vers le pardon ; sur la bruyère verte, 6+6 a
Des vapeurs du matin encor toute couverte, 6+6 a
Le soleil par moments dardait ses grands rayons ; 6+6 b
40 Et mon âme volait en exaltations. 6+6 b
Si notre sort commun, Arvor, veut le permettre, 6+6 a
Sais-tu la haute place où, moi, je veux te mettre ? 6+6 a
Hélas ! Pauvre exilé de l'ombre des taillis, 6+6 b
Je sens qu'il est bien doux de parler du pays. 6+6 b
45 J'en dois savoir parler ! Du moins que ceux des villes 6+6 a
Ne mêlent pas mon nom à leurs intrigues viles ! 6+6 a
J'ai vu leur fiel haineux, leur sourire moqueur, 6+6 b
Et loin d'eux j'ai placé mon esprit et mon cœur ! 6+6 b
Enfin, on distinguait, après plus d'une lieue, 6+6 a
50 Les murs de la chapelle et sa toiture bleue ; 6+6 a
Et même avec l'odeur qui sort du cidre doux 6+6 b
Tous les bruits du pardon arrivaient jusqu'à nous, 6+6 b
Quand le désir nous prit d'aller à la fontaine, 6+6 a
Croyant y retrouver Anne et sa sœur Hélène. 6+6 a
55 Une vieille était là, seule, à laver ses pots, 6+6 b
Qu'elle emplissait d'eau sainte et vendait aux dévots ; 6+6 b
Elle s'en vint à nous disant ses patenôtres, 6+6 a
Et, de mes cheveux courts dupe comme les autres, 6+6 a
La pauvresse ajouta : « je le vois dans vos yeux, 6+6 b
60 Vous revenez de France avec un cœur joyeux. 6+6 b
Avez-vous retrouvé chez lui votre vieux père ? 6+6 a
Celle qui vous aimait vous aime encor, j'espère ! 6+6 a
Désormais au pays vous passerez vos jours, 6+6 b
Et vous épouserez, jeune homme, vos amours. » 6+6 b
65 Trompée à mes habits et par cet air de joie 6+6 a
Que la gaîté d'autrui par instant nous envoie, 6+6 a
Mère, ainsi vous parliez ; hélas ! Et dans Paris 6+6 b
L'histoire de ce jour, tristement je l'écris. 6+6 b
mètre profil métrique : 6+6
forme globale type : suite de distiques
schéma : 34((aa))
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