Métrique en Ligne
BRB_1/BRB35
Auguste BARBIER
Ïambes et poèmes
1831
IL PIANTO
L'ADIEU
Ah ! Quel que soit le deuil jeté sur cette terre 6+6 a
Qui par deux fois du monde a changé le destin, 6+6 b
Quels que soient ses malheurs et sa longue misère, 6+6 a
On ne peut la quitter sans peine et sans chagrin. 6+6 b
5 Ainsi, près de sortir du céleste jardin, 6+6 a
Je me retourne encor sur les cimes hautaines, 6+6 b
Pour contempler de là son horizon divin 6+6 a
Et longtemps m'enivrer de ses grâces lointaines : 6+6 b
Et puis le froid me prend et me glace les veines 6+6 b
10 Et tout mon cœur soupire, oh ! Comme si j'avais, 6+6 c
Aux champs de l'Italie et dans ses larges plaines, 6+6 b
De mes jours effeuillé le rameau le plus frais, 6+6 c
Et sur le sein vermeil de la brune déesse 6+6 a
Épuisé pour toujours ma vie et ma jeunesse. 6+6 a
15 Divine Juliette au cercueil étendue, 6+6 a
Toi qui n'es qu'endormie et que l'on croit perdue, 6+6 a
Italie, ô beauté ! Si malgré ta pâleur, 6+6 b
Tes membres ont encor gardé de la chaleur ; 6+6 b
Si du sang généreux coule encor dans ta veine ; 6+6 a
20 Si le monstre qui semble avoir bu ton haleine, 6+6 a
La mort, planant sur toi comme un heureux amant, 6+6 b
Pour toujours ne t'a pas clouée au monument ; 6+6 b
Si tu n'es pas enfin son entière conquête ; 6+6 a
Alors quelque beau jour tu lèveras la tête, 6+6 a
25 Et, privés bien longtemps du soleil, tes grands yeux 6+6 b
S'ouvriront pour revoir le pur éclat des cieux : 6+6 b
Puis ton corps ranimé par la chaude lumière, 6+6 a
Se dressera tout droit sur la funèbre pierre. 6+6 a
Alors, être plaintif, ne pouvant marcher seul, 6+6 b
30 Et tout embarrassé des longs plis du linceul, 6+6 b
Tu chercheras dans l'ombre une épaule adorée ; 6+6 a
Et, les deux pieds sortis de la tombe sacrée, 6+6 a
Tu voudras un soutien pour faire quelques pas. 6+6 b
Alors à l'étranger, oh ! Ne tends point les bras : 6+6 b
35 Car ce qui n'est pas toi, ni la Grèce ta mère, 6+6 a
Ce qui ne parle point ton langage sur terre, 6+6 a
Et ce qui ne vit pas sous ton ciel enchanteur, 6+6 b
Bien souvent est barbare et frappé de laideur. 6+6 b
L'étranger ne viendrait sur ta couche de lave, 6+6 a
40 Que pour te garrotter comme une blanche esclave ; 6+6 a
L'étranger corrompu, s'il te donnait la main, 6+6 b
Avilirait ton front et flétrirait ton sein. 6+6 b
Belle ressuscitée, ô princesse chérie, 6+6 a
N'arrête tes yeux noirs qu'au sol de la patrie ; 6+6 a
45 Dans tes fils réunis cherche ton Roméo, 6+6 b
Noble et douce Italie, ô mère du vrai beau ! 6+6 b
mètre profil métrique : 6+6
forme globale type : suite de strophes et distiques
schéma : 1(abab) 1(ababbcbc) 1(aa) 16((aa))
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