Métrique en Ligne
BRB_1/BRB26
Auguste BARBIER
Ïambes et poèmes
1831
IL PIANTO
LE CAMPO VACCINO
À M Antoni Deschamps :
C'était l'heure où la terre appartient au soleil, 6+6 a
Où les chemins poudreux luisent d'un ton vermeil, 6+6 a
Où rien n'est confondu dans l'aride campagne, 6+6 b
Où l'on voit les troupeaux dormir sur la montagne, 6+6 b
5 Et le pâtre robuste avec ses beaux chiens blancs 6+6 a
Étaler auprès d'eux ses membres nonchalants, 6+6 a
L'heure aux grands horizons, l'heure où l'ombre est mortelle 6+6 b
Au voyageur suant qui s'arrête sous elle, 6+6 b
Où le pélerin las, son bâton à la main, 6+6 a
10 Laisse tomber la tête en suivant son chemin, 6+6 a
Où l'on n'entend au loin sous les herbes brûlantes 6+6 b
Que les cris répétés des cigales bruyantes, 6+6 b
L'heure où le ciel est rouge, où le cyprès est noir, 6+6 a
Et Rome en son désert encor superbe à voir 6+6 a
15 À cette heure, j'étais sur un monceau de briques, 6+6 b
Et, le dos appuyé contre des murs antiques, 6+6 b
Je regardais, de là, s'étendre devant moi 6+6 a
La vieille majesté des champs du peuple roi ; 6+6 a
Et rien ne parlait haut comme le grand silence 6+6 b
20 Qui dominait alors cette ruine immense, 6+6 b
Rien ne m'allait au cœur comme ces murs pendants, 6+6 a
Ces terrains sillonnés de mâles accidents, 6+6 a
Et la mélancolie empreinte en cette terre 6+6 b
Qui ne saurait trouver son égale en misère. 6+6 b
25 Sublime paysage à ravir le pinceau ! 6+6 a
Le colysée avait tout le fond du tableau ! 6+6 a
Le monstre, de son orbe envahissant l'espace, 6+6 b
Foulait de tout son poids la terre jaune et grasse ; 6+6 b
Là, ce grand corps sevré de sang pur et de chair, 6+6 a
30 Étalait tristement ses vieux membres à l'air, 6+6 a
Et le ciel bleu luisant à travers ses arcades, 6+6 b
Ses pans de murs croulés, ses vastes colonnades, 6+6 b
Semait ses larges reins de feux d'azur et d'or, 6+6 a
Comme au soleil d'Afrique un reptile qui dort. 6+6 a
35 À droite, en long cordon, au-dessous de sa tête, 6+6 b
Du haut d'une terrasse à crouler toute prête, 6+6 b
Tombaient de larges flots de feuillages confus, 6+6 a
Des pins au vert chapeau, des platanes touffus, 6+6 a
Et des chênes voûtés, dont la racine entière 6+6 b
40 Jaillissait comme l'onde à travers chaque pierre, 6+6 b
L'ombre épaisse, je crois, des jardins de Néron, 6+6 a
Le seul dont le bas peuple ait conservé le nom 6+6 a
À gauche, près d'un mur chargé d'herbes nouvelles, 6+6 b
Le temple de la paix aux trois voûtes jumelles, 6+6 b
45 Immense, laissait voir par un trou dans le fond 6+6 a
Les hauts remparts de Rome et son désert profond ; 6+6 a
Puis Castor et Pollux, dépouillés de leurs marbres, 6+6 b
Avec d'humbles maisons se perdaient sous les arbres, 6+6 b
Et les arbres voilaient de leurs feuillages roux 6+6 a
50 Le grand arc de sévère enfoui jusqu'aux genoux ; 6+6 a
Enfin dans le milieu de cette large enceinte, 6+6 b
Auprès du capitole et de sa base sainte, 6+6 b
La terre de Remus, le vieux pavé romain 6+6 a
Mais las ! Dans quel état ! Tout meurtri par la main 6+6 a
55 Et par le pied brutal de cent hordes guerrières, 6+6 b
Un terrain sillonné de briques et de pierres, 6+6 b
Et semé de trous noirs et si larges, que l'eau 6+6 a
Faisait plus d'une mare en cherchant son niveau. 6+6 a
Comme des souvenirs, là, de frêles colonnes 6+6 b
60 Dressent de loin en loin leurs jaunâtres couronnes, 6+6 b
Et leurs feuilles d'acanthe et leurs fûts cannelés 6+6 a
Rappellent la splendeur des siècles écoulés. 6+6 a
Mais en vain, bien en vain, sur leurs bases rompues, 6+6 b
Quelques-unes encor, comme des vierges nues 6+6 b
65 Semblent mener un chœur, et se donnant la main, 6+6 a
Chanter d'un noble accord un hymne pur et saint 6+6 a
À la blanche concorde ; en vain une lointaine 6+6 b
Élève dans les airs sa taille souveraine, 6+6 b
Et montre encor Phocas luisant de pourpre et d'or 6+6 a
70 Devant l'autel brisé de Jupiter Stator : 6+6 a
Oh ! Toutes, le front chauve et le pied dans les terres, 6+6 b
Pauvres enfants perdus, romaines solitaires, 6+6 b
Elles sont toutes là, dans ces champs désolés, 6+6 a
Comme après le carnage et sur des murs croulés 6+6 a
75 Des filles de vaincus qui pleurent sur leurs pères. 6+6 b
Toutes, dans le silence et sans plaintes amères, 6+6 b
Elles vont protestant de leurs fragments pieux 6+6 a
Contre la barbarie et tous les nouveaux dieux. 6+6 a
Pleure, pleure et gémis, beau temple de Faustine ; 6+6 b
80 Tes colonnes de marbre et ta frise latine, 6+6 b
Et ton fronton meurtri, fléchissent sous le poids 6+6 a
Du plus lourd des enfants qu'ait engendrés la croix : 6+6 a
Pleure ! Pleure et gémis, car l'indigne coupole 6+6 b
Toujours blesse tes flancs et ta divine épaule ; 6+6 b
85 Sur toi pèse toujours le dôme monacal, 6+6 a
Comme un barbare assis sur un noble cheval. 6+6 a
Et toi, divin Titus, roi des belles journées, 6+6 b
Qu'est devenu ton arc aux pierres inclinées ? 6+6 b
Et cette large voûte, où de nobles tableaux 6+6 a
90 Montraient l'arche captive avec les saints flambeaux, 6+6 a
Et le peuple des juifs, vaincu, les deux mains jointes, 6+6 b
Pleurant devant ton char ses murailles éteintes ? 6+6 b
Où sont tes écussons par la foudre sculptés ? 6+6 a
Tes cavaliers romains par le temps démontés ? 6+6 a
95 Grand Titus, tu n'as plus que la robe sublime 6+6 b
Dont les siècles toujours décorent leur victime, 6+6 b
La rouille, et demi-nus, penchés de toutes parts, 6+6 a
Tes membres sont ridés comme ceux des vieillards. 6+6 a
Ô superbes fiévreux, gras habitants du Tibre, 6+6 b
100 Enfants dégénérés d'un peuple qui fut libre, 6+6 b
Je ne viens pas chercher à vos tristes foyers 6+6 a
De mâles sénateurs et d'antiques guerriers, 6+6 a
Le dévouement sans borne à la mère chérie 6+6 b
Que vous nommiez jadis du beau nom de patrie, 6+6 b
105 La croyance éternelle aux murs de Romulus, 6+6 a
L'auguste pauvreté, les rustiques vertus, 6+6 a
Et la robuste foi qui, sur un crâne immonde, 6+6 b
A bâti huit cents ans la conquête du monde ; 6+6 b
Ces rudes éléments et du grand et du beau 6+6 a
110 Ne peuvent plus entrer dans votre étroit cerveau. 6+6 a
Ce que je veux de vous, ce sont de saints exemples, 6+6 b
C'est le respect aux morts, c'est la paix aux vieux temples. 6+6 b
Or donc, assez longtemps, sur ce terrain hâlé, 6+6 a
Vieille louve au flanc maigre, avarice a hurlé ; 6+6 a
115 Assez, assez longtemps, sans pudeur et sans honte, 6+6 b
Vos pères ont sucé ses mamelles de fonte ; 6+6 b
Dans Rome, assez longtemps, prélats et citoyens, 6+6 a
Se ruant par milliers sur les temples païens, 6+6 a
Ont violé le seuil des royales enceintes, 6+6 b
120 Volé les dieux d'airain, fondu les portes saintes, 6+6 b
Et comme des goujats avides de trésors, 6+6 a
Jusqu'au dernier lambeau déshabillé les morts. 6+6 a
Maintenant tout est fait : ruines séculaires, 6+6 b
Leurs murs ne peuvent plus tenter les mains vulgaires : 6+6 b
125 Pas une lame d'or à leurs flancs vermoulus ; 6+6 a
De l'antique splendeur il ne leur reste plus 6+6 a
Que la forme première, et la belle harmonie, 6+6 b
Dont les a, tout enfants, revêtus le génie ; 6+6 b
La forme et des contours, voilà tous leurs appas. 6+6 a
130 Ô romains d'aujourd'hui ! Si l'art ne vous prend pas, 6+6 a
Du moins par piété respectez des victimes, 6+6 b
Souvenez-vous toujours des paroles sublimes 6+6 b
Que la lyre divine, en des temps de malheurs, 6+6 a
Envoyait courageuse aux saints dévastateurs. 6+6 a
135 Les temples, quels qu'ils soient, sont les âmes des villes ; 6+6 b
Sans eux, toute cité n'a que des pierres viles ; 6+6 b
Du foyer domestique et du corps des vieillards 6+6 a
Les monuments sacrés sont les derniers remparts ; 6+6 a
Et, lorsque sur la terre ils penchent en ruines, 6+6 b
140 Leurs ruines encor sont des choses divines, 6+6 b
Ce sont des prêtres saints que l'âge use toujours, 6+6 a
Mais qu'il faut honorer jusqu'à leurs derniers jours. 6+6 a
Hélas ! Tel est le train de ce monde où nous sommes, 6+6 b
Et l'art entre si peu dans la tête des hommes, 6+6 b
145 Que peut-être mes cris vainement écoutés 6+6 a
S'en iront sans échos par les vents emportés. 6+6 a
L'homme ici ne croit plus qu'aux choses que l'on touche, 6+6 b
Au pain qu'on mange, au vin qui parfume la bouche, 6+6 b
À la gorge en fureur qui bondit sous la main, 6+6 a
150 Et puis au coutelas qui vous perce le sein. 6+6 a
Pour le reste, néant ; sous ses paupières brunes 6+6 b
Peuvent s'amonceler des torrents de fortunes, 6+6 b
La terre peut trembler sous les plus hauts destins, 6+6 a
Des fronts peuvent jaillir les chants les plus divins, 6+6 a
155 Aux cieux peuvent briller les plus illustres gloires : 6+6 b
Tout ici, jusqu'au nom, s'efface des mémoires, 6+6 b
Et quand vous demandez : qui jadis là vivait ? 6+6 a
Le peuple indifférent vous répond : qui le sait ! 6+6 a
Ah ! Sommes-nous donc tous sous un souffle de glace, 6+6 b
160 Sous un vent fade et mou qui nous ride la face, 6+6 b
Nous ôte la vigueur, nous arrête le pouls, 6+6 a
Et sous nos corps penchés fait trembler nos genoux ? 6+6 a
Avons-nous en dégoût pris toute gloire humaine, 6+6 b
Et vivant pour nous seuls, sans amour et sans haine, 6+6 b
165 N'aspirons-nous qu'au jour où le froid du tombeau 6+6 a
Comme un vieux parchemin nous jaunira la peau ? 6+6 a
Faut-il se dire enfin sous le mal qui nous ronge : 6+6 b
L'art n'est plus qu'un vain mot, un stérile mensonge ; 6+6 b
Le temps a tout usé ce tissu précieux, 6+6 a
170 Ce riche vêtement, cet habit gracieux, 6+6 a
Que Dieu fila lui-même, et que sa main féconde 6+6 b
Déploya pour couvrir la nudité du monde, 6+6 b
La forme ! — elle si grande et belle au premier jour, 6+6 a
Si belle que le maître, avec un œil d'amour 6+6 a
175 Contemplant de son haut l'univers plein de grâce, 6+6 b
Et comme en un miroir y reflétant sa face, 6+6 b
Pensa quelques instants que le monde était bien, 6+6 a
Et qu'en ses éléments le mal n'entrait pour rien : 6+6 a
La forme ! Elle a perdu sa pureté première. 6+6 b
180 Partout l'homme aujourd'hui maltraite la matière, 6+6 b
Et son souffle ternit la native fraîcheur 6+6 a
Qu'elle avait comme un fruit que l'on cueille en sa fleur, 6+6 a
Plus l'homme avide étend son empire sur terre, 6+6 b
Plus la forme pâlit sous la main adultère, 6+6 b
185 Plus cette belle trame et ce réseau divin 6+6 a
Échangent leurs fils d'or contre des fils d'airain, 6+6 a
Plus cette eau sans limon va roulant de la fange, 6+6 b
Plus ce beau ciel limpide et ce bleu sans mélange 6+6 b
Voient s'étendre sur eux de nuages épais, 6+6 a
190 Et la foudre en éclats leur enlever la paix : 6+6 a
Si bien qu'un jour, ridé comme un homme en vieillesse, 6+6 b
Le globe dépouillé de grâce et de jeunesse, 6+6 b
Faute de forme, irait, sans secousse et sans maux, 6+6 a
Replonger de lui-même au ventre du chaos 6+6 a
195 Oh ! Pardonne, mon dieu, ces cris illégitimes ! 6+6 b
C'est que le désespoir va bien aux cœurs sublimes, 6+6 b
C'est que la forme morte et sans recouvrement 6+6 a
Est une chose amère à qui sent fortement. 6+6 a
Aussi, chœurs des souffrants, ô troupes lamentables, 6+6 b
200 Amants, tristes époux, mères inconsolables, 6+6 b
Vous qu'une forme absente accable de douleurs, 6+6 a
Et le jour et la nuit fait sécher dans les pleurs, 6+6 a
Vous, poëtes divins, chanteurs au front austère. 6+6 b
Et vous, prêtres de l'art, ô peintres qui, sur terre, 6+6 b
205 Pliant les deux genoux, comme l'antiquité, 6+6 a
Vous faites de la forme une divinité ; 6+6 a
Vous tous, êtres nerveux, qui ne vivez au monde 6+6 b
Que par le sentiment de sa beauté profonde, 6+6 b
Oh ! Comme je vous plains, oh ! Comme je conçois 6+6 a
210 Votre douleur sans borne et vos lèvres sans voix, 6+6 a
Lorsque de vos amours les lignes périssables 6+6 b
S'effacent devant vous comme un pied dans les sables ; 6+6 b
Lorsqu'une voix éclate en un dernier effort, 6+6 a
Et qu'un beau front se fane au souffle de la mort ; 6+6 a
215 Ou bien lorsqu'à vos yeux une blanche statue, 6+6 b
Sous le marteau brutal qui la frappe et la tue, 6+6 b
Se brise, et que la forme impossible à saisir 6+6 a
Comme une âme s'en va pour ne plus revenir ! 6+6 a
Et toi, divin amant de cette chaste Hélène, 6+6 b
220 Sculpteur au bras immense, à la puissante haleine, 6+6 b
Artiste au front paisible avec les mains en feu, 6+6 a
Rayon tombé du ciel et remonté vers Dieu ; 6+6 a
Ô Goethe, ô grand vieillard ! Prince de Germanie ! 6+6 b
Penché sur Rome antique et son mâle génie, 6+6 b
225 Je ne puis m'empêcher, dans mon chant éploré, 6+6 a
À ce grand nom croulé d'unir ton nom sacré, 6+6 a
Tant ils ont tous les deux haut sonné dans l'espace, 6+6 b
Tant ils ont au soleil tous deux tenu de place, 6+6 b
Et dans les cœurs amis de la forme et des dieux 6+6 a
230 Imprimé pour toujours un sillon glorieux. 6+6 a
Hélas ! Long-temps du fond de ton sol froid et sombre, 6+6 b
Sur l'univers entier se pencha ta grande ombre. 6+6 b
Longtemps, sublime temple à tous les dieux ouvert, 6+6 a
On entendit tes murs chanter plus d'un concert, 6+6 a
235 Et l'on vit promener sur tes superbes dalles 6+6 b
Mille jeunes beautés aux formes idéales. 6+6 b
Longtemps tu fus le roi d'une noble cité 6+6 a
Que l'harmonie un jour bâtit à ton côté, 6+6 a
Et longtemps, quand le sort eut brisé ces portiques, 6+6 b
240 Qui rappelaient Athène et les grâces antiques, 6+6 b
Toi seul restant debout, ô splendide vieillard ! 6+6 a
Comme atlas, tu portas le vaste ciel de l'art. 6+6 a
Enfin toujours brillant, toujours jonché d'hommage, 6+6 b
Il semblait ici-bas que tu n'avais pas d'âge, 6+6 b
245 Jusqu'au jour où la mort, te frappant à son tour, 6+6 a
Fit crouler ton grand front comme une simple tour. 6+6 a
Ô mère de douleur ! ô mort pleine d'audace ! 6+6 b
À maudire tes coups toute langue se lasse, 6+6 b
Mais la mienne jamais ne se fatiguera 6+6 a
250 À dire tout le mal que ton bras a fait là. 6+6 a
Depuis qu'elle est à bas, cette haute colonne, 6+6 b
Il me semble que l'art a perdu sa couronne ; 6+6 b
Le champ de poésie est un morne désert, 6+6 a
Où l'on voit à grand'peine un noble oiseau passer. 6+6 a
255 Les plus lourds animaux y cherchent leur pâture, 6+6 b
Les vils serpents y vont traîner leur pourriture, 6+6 b
Et leur gueule noircit de poison et de fiel 6+6 a
Le pied des monuments qui regardent le ciel ; 6+6 a
C'est un champ plein de deuil, où la froide débauche 6+6 b
260 Vient parmi les roseaux que jamais l'on ne fauche 6+6 b
Hurler des chants hideux et cacher ses ébats ; 6+6 a
C'est un sol sans chemin, où l'on tombe à tout pas, 6+6 a
Où, parmi les grands trous, et sur les ronces vives, 6+6 b
Autour des monuments quelques âmes plaintives 6+6 b
265 Descendent par hasard ; et là, dans les débris, 6+6 a
Versent des pleurs amers et poussent de longs cris. 6+6 a
Ô vieille Rome ! ô Goethe ! ô puissances du monde ! 6+6 b
Ainsi donc votre empire a passé comme l'onde, 6+6 b
Comme un sable léger qui coule dans les doigts, 6+6 a
270 Comme un souffle dans l'air, comme un écho des bois. 6+6 a
Adieu, vastes débris ! Dans votre belle tombe 6+6 b
Dormez, dormez en paix ; voici le jour qui tombe. 6+6 b
Au faîte des toits plats, au front des chapiteaux, 6+6 a
L'ombre pend à grands plis comme de noirs manteaux ; 6+6 a
275 Le sol devient plus rouge et les arbres plus sombres ; 6+6 b
Derrière les grands arcs, à travers les décombres, 6+6 b
Le long des chemins creux, mes regards entraînés 6+6 a
Suivent des buffles noirs deux à deux enchaînés ; 6+6 a
Les superbes troupeaux, à la gorge pendante, 6+6 b
280 Reviennent à pas lent de la campagne ardente, 6+6 b
Et les pâtres velus, bruns, et la lance au poing, 6+6 a
Ramènent à cheval des chariots de foin ; 6+6 a
Puis passe un vieux prélat, ou quelque moine sale, 6+6 b
Qui va battant le sol de sa triste sandale ; 6+6 b
285 Des frères en chantant portent un blanc linceul, 6+6 a
Un enfant demi-nu les suit et marche seul ; 6+6 a
Des femmes en drap rouge et de brune figure 6+6 b
Descendent en filant les degrés de verdure ; 6+6 b
Les gueux déguenillés qui dormaient tous en tas 6+6 a
290 Se lèvent lentement pour prendre leur repas ; 6+6 a
L'ouvrier qui bêchait et roulait sa brouette 6+6 b
La quitte : le travail, les pelles, tout s'arrête ; 6+6 b
On n'entend plus au loin qu'un murmure léger, 6+6 a
Que le cri d'un ânon, le sifflet d'un berger, 6+6 a
295 Ou, derrière un fronton renversé sur la terre, 6+6 b
Quatre forts mendiants couchés avec mystère, 6+6 b
Qui, les cinq doigts tendus et le feu dans les yeux, 6+6 a
Disputent sourdement des baïoques entre eux. 6+6 a
mètre profil métrique : 6+6
forme globale type : suite de distiques
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