Métrique en Ligne
P = préposition
C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
BOU_2/BOU41
Louis BOUILHET
POÉSIES. FESTONS ET ASTRAGALES
1859
LE LION
A EUGÈNE DELATTRE
Quand, dans le vieux Paris, | les mignons pleins de joie 6+6 a
Secouaient, en passant, | l'ambre de leurs cheveux, 6+6 b
Certe, ils gardaient en cor, | sous la cape de soie, 6+6 a
La foi des chevaliers | et l'honneur des aïeux ; 6+6 b
5 Dans le coffre aux onguents | ils cachaient une épée, 6+6 a
La dague étincelait | au bout des colliers d'or, 6+6 b
Et ces enfants d'amour, | prêts à toute équipée, 6+6 a
Au nombre des plaisirs | avaient compté la mort ! 6+6 b
Quand les roués dansaient, | aux jours de la Régence, 6+6 a
10 Blancs de poudre, et musqués, | sous un pourpoint fleuri, 6+6 b
Ils sauvaient la débauche | à force d'élégance, 6+6 a
Et n'avaient pas de cœur, | tant ils avaient d'esprit ! 6+6 b
Quand les beaux muscadins, | de leurs jaunes bottines 6+6 a
Frappaient, en sautillant, | le pavé des faubourgs, 6+6 b
15 Ils faisaient leur toilette | au pied des guillotines, 6+6 a
Réglaient la carmagnole | au rhythme des tambours, 6+6 b
Et, secouant le sang | de leurs dentelles fines, 6+6 a
De l'humide abattoir | ils volaient aux amours ! 6+6 b
L'incroyable, appuyé | sur sa pomme d'agate, 6+6 a
20 Portait la République | au pli de sa cravate. 6+6 a
Le fringant officier, | du temps de l'Empereur, 6+6 a
Quand son sabre traînait, | en sonnant, sur les dalles, 6+6 b
Pouvait montrer, du moins, | aux nations rivales, 6+6 b
La blessure à son front | et la croix sur son cœur. 6+6 a
25 Tous, page aux cheveux blonds, | marquis à l'habit rose, 6+6 a
Ceux de quatre-vingt-treize | et de mil huit cent deux, 6+6 b
Esprit, grâce .ou fierté, | tous avaient quelque chose 6+6 a
Dont le monde longtemps | se souvint après eux. 6+6 b
Mais lui, qu'a-t-il gardé, | le lion ridicule, 6+6 a
30 Le Richelieu bourgeois, | le don Juan roturier, 6+6 b
Grotesque conquérant | à la barbe d'Hercule, 6+6 a
Marquis de Carabas | dont le père est meunier ! 6+6 b
Dites ? quel est son droit ? | quel laquais en démence 6+6 a
Sur des coussins de pourpre | enivra son enfance ? 6+6 a
35 Au peuple que son char | éclabousse en chemin 6+6 a
Quel blason montre-t-il, | sur un vieux parchemin ? 6+6 a
Lui, qui siffla jadis | les nobles d'un autre âge ! 6+6 a
Lui, que berça Juillet, | au branle du canon ! 6+6 b
Valet qui des grandeurs | a fait l'apprentissage, 6+6 a
40 Insolent, moins l'esprit ! | vaniteux, moins le nom ! 6+6 b
Ah ! c'est pitié de voir | ce commis hors d'haleine, 6+6 a
Bouffi dans son orgueil | et dans son habit noir, 6+6 b
Faire, à l'égal d'un droit, | sonner sa bourse pleine, 6+6 a
Et secouer au vent | la poudre du comptoir ! 6+6 b
45 Bravo ! marchands dorés ! | nobles fils de famille ! 6+6 a
Du talon, sans remords, | foulez le peuple impur ! 6+6 b
Étalez vos couleurs, | blasons de pacotille, 6+6 a
Pains de sucre en sautoir | et coton sur azur ! 6+6 b
Vous n'atteindrez jamais | à l'aristocratie, 6+6 a
50 Et toujours, mes seigneurs, | malgré vos airs galants, 6+6 b
Vos gros pieds perceront | sous la botte vernie, 6+6 a
Vos grosses mains feront | éclater vos gants blancs ! 6+6 b
mètre profil métrique : 6+6
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