Métrique en Ligne
P = préposition
C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
BAY_1/BAY5
corpus Pamela Puntel
Hippolyte BAYE
LA FRONTIÈRE
ESSAIS DE POÉSIES
1871
LE CONQUÉRANT
Des bruits avant-coureurs ont semé l'épouvante. 6+6 a
A la vitre déserte, on voit percer le deuil. 6+6 b
Le carrefour s'emplit d'une .masse vivante ; 6+6 a
Dans l'air silencieux quelque voix discordante 6+6 a
5 Porte au loin la terreur et sonne avec orgueil. 6+6 b
Sur le seuil attendri par le pas d'une mère 6+6 c
Retentissent le sabre et l'éperon vibrant ; 6+6 d
Ils rompent des verrous la défense éphémère 6+6 c
Le foyer envahi ! quelle douleur amère ! 6+6 c
10 Mais cachons bien nos pleurs : voici le conquérant ! 6+6 d
Dans les scintillements de mille baïonnettes, 6+6 a
Il s'avance escorté de ses sanglants drapeaux. 6+6 b
La crainte a mis un sceau sur les lèvres muettes, 6+6 a
Et nul ne saurait lire, aux faces inquiètes, 6+6 a
15 Si l'amour ou la haine anime ses troupeaux. 6+6 b
Un soldat épuisé, sans pain, chancelle et tombe. 6+6 c
Dans une fosse humide, il se couche mourant. 6+6 d
Encore un jeune espoir englouti par la tombe ! 6+6 c
Mais que fait au vautour le sort dé la colombe ? 6+6 c
20 C'est dans un nid d'airain qu'éclôt un conquérant. 6+6 d
Humble, la cité tremble et s'agenouille en larmes. 6+6 a
Sa prosternation fait grandir le vainqueur. 6+6 b
Dans le temple chrétien il engouffre ses armes, 6+6 a
Et le clairon répand d'insolentes alarmes 6+6 a
25 Sous les arceaux troublés de la nef et du chœur. 6+6 b
L'orgue élève pour lui sa voix douce et profonde ; 6+6 c
Et les flots vaporeux de l'encens enivrant, 6+6 d
De l'encens réservé pour le Sauveur du monde, 6+6 c
Baignent un front chargé d'une tiare immonde : 6+6 c
30 Le casque d'un soudard appelé conquérant. 6+6 d
La victoire aujourd'hui couronna la bataille. 6+6 a
Il est nuit. Des flambeaux constellent le quartier. 6+6 b
Partout fument les plats chers à la valetaille. 6+6 a
La céleste Harmonie, au pied de la muraille, 6+6 a
35 Chante, prostituée à l'écraseur altier. 6+6 b
Dans un hangar voisin, le vent du nord soupire : 6+6 c
Là, gisent des blessés sur l'un et l'autre rang ; 6+6 d
L'un conjure le ciel, l'autre en silence expire. 6+6 c
Leurs membres ont valu des duchés à l'empire. 6+6 c
40 Qu'est-ce qu'à leurs foyers rendra le conquérant ? 6+6 d
Quelle aurore nocturne empourpre la verdure ? 6+6 a
Un incendie immense aux élans furieux, 6+6 b
Comme un tigre emportant une fraîche pâture, 6+6 a
Bondit de seuil en seuil, de toiture en toiture, 6+6 a
45 Et de sa griffe rouge ose tâter les cieux. 6+6 b
Un long débris d'humains, éplorés, pêle-mêle, 6+6 c
S'efforcent d'échapper au monstre dévorant. 6+6 d
Lorsque retombera la dernière étincelle, 6+6 c
Des squelettes noircis, seuls, — monument fidèle, — 6+6 c
50 Diront : « Ces lieux ont vu passer un conquérant. » 6+6 d
Il est au fond de l'Inde une infernale idole. 6+6 a
Sur un char monstrueux son autel est porté. 6+6 b
Il roule ; tout un peuple en vertige s'immole, 6+6 a
Et le sage brahmane aspire à l'auréole 6+6 a
55 De se faire broyer sous sa divinité. 6+6 b
L'heureuse Europe assiste à des pompes pareilles. 6+6 c
J'ai vu, — sortant du Nord, — un peuple délirant 6+6 d
De son dieu par ses cris réjouir les oreilles, 6+6 c
Et pétrir de sa chair de sanglantes merveilles 6+6 c
60 Au monarque prussien, Jaguernauth-conquérant. 6+6 d
mètre profil métrique : 6+6
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