Métrique en Ligne
a voyelle stable
er voyelle ambigüe
e "e" masculin
e "e" féminin
e "e" élidé
e "e" ignoré
e "e" écarté
12 longueur métrique
6-6 mètre
BAN_3/BAN146
Théodore de BANVILLE
Les Exilés
1867
L'ÎLE
C'est un riant Éden,un splendide Avalon, 6+6 a
Que le grand nord féeriquea voilé dans sa brume, 6+6 b
Et les chênes géants,l'ombre du frais vallon, 6+6 a
Y montrent pour ceintureune frange d'écume. 6+6 b
5 Les fiers camellias,les aloès pensifs, 6+6 a
Fleurissent en plein soldans l'île fortunée 6+6 b
Que la rose parfume,et contre ses récifs 6+6 a
L'inconsolable merse débat enchnée. 6+6 b
La mer, écoutez-larugir ! La vaste mer 6+6 a
10 Dresse, en pleurant, ses montsaux farouches descentes 6+6 b
Et soupire, et ses flotséchevelés dans l'air 6+6 a
Hurlent comme un troupeaude femmes gémissantes. 6+6 b
Elle pense, elle songe,et quelque souvenir 6+6 a
L'agite. Avec ses cris,avec sa voix sauvage 6+6 b
15 Elle annonce quelqu'unde grand qui va venir. 6+6 a
Il vient ; regardez-lepasser sur le rivage. 6+6 b
Regardez-le passer,grave, au bord de la mer, 6+6 a
C'est un sage, c'est unsuperbe esprit tranquille, 6−6 b
Hôte de l'ouragansombre et du flot amer, 6+6 a
20 Divin comme Hésiode,auguste comme Eschyle. 6+6 b
Il marche, hôte rêveur,lisant dans le ciel bleu. 6+6 a
Son corps robuste est commeun chêne et son front penche, 6+6 b
Son habit est grossier,son regard est d'un dieu, 6+6 a
Son œil profond contientun ciel, sa barbe est blanche. 6+6 b
25 Les ans, l'âpre douleur,ont neigé sur son front ; 6+6 a
Il n'a plus rien des biensque la jeunesse emporte ; 6+6 b
Il a subi l'erreur,l'injustice, l'affront, 6+6 a
La haine ; sa patrieest loin, sa fille est morte. 6+6 b
Tant de maux, tant de soins,tant de soucis jaloux 6+6 a
30 Ont-ils rendu son âmeinquiète ou méchante ? 6+6 b
Petits oiseaux des bois,il est doux comme vous. 6+6 a
Comment s'est-il vengédes envieux ? Il chante. 6+6 b
Jadis il a connule prestige imposant, 6+6 a
Les applaudissementsqu'on est joyeux d'entendre, 6+6 b
35 Les honneurs, le tumulte ;il se dit à présent : 6+6 a
« Qu'était cette fumée,et qu'était cette cendre ? » 6+6 b
Contre le mal, pareilaux flèches d'or du jour, 6+6 a
Indigné comme il futdans la bouche d'Alcée, 6+6 b
Et d'autres fois divin,fait d'azur, plein d'amour, 6+6 a
40 Le vers éblouissantjaillit dans sa pensée. 6+6 b
À son côté, pareilleaux beaux espoirs déçus, 6+6 a
La muse charité,grâce fière et touchante, 6+6 b
Au front brillant encordu baiser de Jésus, 6+6 a
Visible pour lui seul,porte une lyre. Il chante. 6+6 b
45 Et son ode, si douceau fond des bosquets verts 6+6 a
Qu'elle enchante le lyset ravit la mésange, 6+6 b
Résonne formidableau bout de l'univers 6+6 a
Comme un clairon mordupar la bouche d'un ange. 6+6 b
Alors, au haut des cieuxplus riants et plus chauds, 6+6 a
50 L'avenir, pénétré,soulève enfin tes voiles, 6+6 b
Ô rêve ! Et le plafondténébreux des cachots, 6+6 a
Déchiré tout à coup,laisse voir des étoiles. 6+6 b
L'esclave humilié,le pauvre, le maudit, 6+6 a
Sont relevés tandisqu'il accomplit sa tâche, 6+6 b
55 Et ce rouge assassinde l'ombre, ce bandit, 6+6 a
L'échafaud, démasqué,frissonne comme un lâche. 6+6 b
Esprit caché là-basdans la brume du nord, 6+6 a
Il répand sa clartésur nous, tant que nous sommes. 6+6 b
Qui donc l'a fait si pur ?C'est le courroux du sort. 6+6 a
60 Et qui l'a fait si grand ?C'est l'injure des hommes. 6+6 b
Le sage errant n'a plusici-bas de prison. 6+6 a
Le délaissé qui n'aplus rien n'a plus de chnes. 6+6 b
Sa demeure infiniea pour mur l'horizon ; 6+6 a
Il parle avec la sourceet vit avec les chênes ! 6+6 b
65 Si cette flamme d'astreéclate dans ses yeux, 6+6 a
Si ce vent inconnufouette sa chevelure, 6+6 b
C'est parce qu'il entendle mot mystérieux 6+6 a
Que depuis cinq mille ansbégayait la nature ! 6+6 b
Ô mère ! Dont l'azurest le manteau serein, 6+6 a
70 Donne tous tes trésors,nature, sainte fée, 6+6 b
À ce passant connude l'aigle souverain 6+6 a
Qui connt ton langageet tes noms, comme Orphée. 6+6 b
Et toi qui l'accueillis,sol libre et verdoyant, 6+6 a
Qui prodigues les fleurssur tes coteaux fertiles 6+6 b
75 Et qui sembles sourireà l'océan bruyant, 6+6 a
Sois bénie, île verte,entre toutes les îles. 6+6 b
Oui, sois bénie. Il amarché dans ton sillon, 6+6 a
Comme passaient ailleurs,laissant leur trace ardente 6+6 b
Et trnant l'un sa pourpre,et l'autre son haillon, 6+6 a
80 Le voyageur Homèreet le voyageur Dante. 6+6 b
mètre profil métrique : 6−6
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