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| = césure
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Théodore de BANVILLE
Les Exilés
1867
ROLAND
Roncevaux ! Roncevaux ! Que te faut-il encor ? 6+6 a
Il s'est éteint l'appel désespéré du cor. 6+6 a
Hauts sont les puys et longs et ténébreux, mais Charles, 6+6 b
Frémissant dans sa chair, entend que tu lui parles, 6+6 b
5 Et, couchés à jamais pour l'éternel repos, 6+6 a
Les païens gisent morts par milliers, par troupeaux, 6+6 a
Sur le sable, à côté des français intrépides. 6+6 b
Ah ! Les vaux sont profonds, et les gaves rapides, 6+6 b
Et la rafale fait tournoyer sur les monts 6+6 a
10 Ces âmes de corbeaux qu'emportent les démons. 6+6 a
Tandis que l'empereur à la barbe fleurie 6+6 b
Accourt, hélas ! Trop tard vers l'affreuse tuerie, 6+6 b
Ô douleur ! Dans le fond des défilés étroits, 6+6 a
Au pied des rocs de marbre, ils ne sont plus que trois : 6+6 a
15 L'archevêque Turpin, qui, la mort sur la joue, 6+6 b
Navre encor les païens, qu'on l'en blâme ou l'en loue, 6+6 b
Et le brave Gautier De Luz, et puis Roland. 6+6 a
Olivier est tombé, qui, déjà chancelant, 6+6 a
Et l'œil au paradis qui devant lui flamboie, 6+6 b
20 Hauteclaire à la main, criait encor : Montjoie ! 6+6 b
Il dort, le fier marquis, auprès de Veillantif. 6+6 a
Cependant, à venger notre France attentif, 6+6 a
Sous son armure d'or, pâle, souillé de fange, 6+6 b
Roland, sanglant, blessé, poudreux, fier comme un ange, 6+6 b
25 Combat en vaillant preux qui sait bien son métier. 6+6 a
Turpin de son épieu fait merveille ; Gautier 6+6 a
Est plus rouge partout qu'une grenade mûre ; 6+6 b
Le sang de tous côtés tombe de son armure, 6+6 b
Et Roland frappe, ayant une blessure au flanc. 6+6 a
30 Durandal avait tant travaillé que le sang 6+6 a
Ruisselait sur sa lame, et l'enveloppait toute 6+6 b
D'un humide fourreau vermeil, et goutte à goutte 6+6 b
Pleuvait en même temps de tous les points du fer. 6+6 a
On eût dit que Roland, revenu de l'enfer, 6+6 a
35 Tînt un glaive de feu levé sur les infâmes, 6+6 b
D'où sa main secouait de la braise et des flammes. 6+6 b
Tout ce sang tombait dru sur lui, sur son coursier, 6+6 a
Débordant, émoussait le tranchant de l'acier, 6+6 a
Et, lorsque le héros s'élançait comme en rêve, 6+6 b
40 Bouillonnait en flot clair à la pointe du glaive. 6+6 b
Son odeur enivrante attirait les vautours. 6+6 a
« Ah ! S'écriait le bon Roland frappant toujours 6+6 a
Devant lui, si, ma main étant moins occupée, 6+6 b
Je pouvais seulement essuyer mon épée ! » 6+6 b
45 Il dit, et sur le front du sarrasin maudit 6+6 a
Frappe ; alors monseigneur saint Michel descendit 6+6 a
Du ciel, et vers Roland, occupé de combattre, 6+6 b
Accourut, enjambant dans l'éther quatre à quatre 6+6 b
Les clairs escaliers bleus du paradis. Il vint 6+6 a
50 Au comte qui luttait, souriant, contre vingt 6+6 a
Mécréants, et son fer n'était qu'une souillure. 6+6 b
Mais l'archange éclatant, dont l'ample chevelure 6+6 b
De rayons d'or frissonne autour de son front pur, 6+6 a
Essuya Durandal à sa robe d'azur. 6+6 a
55 Ensuite il regagna les cieux. Dans la mêlée 6+6 b
Roland continuait sa course échevelé. 6+6 b
Comme le bûcheron s'abat sur la forêt, 6+6 a
Sa grande épée, heureuse et rajeunie, ouvrait 6+6 a
Les fronts casqués ; à chaque estocade nouvelle, 6+6 b
60 On en voyait jaillir le sang et la cervelle ; 6+6 b
Et les noirs bataillons qu'il touchait en marchant 6+6 a
Disparaissaient, ainsi que les épis d'un champ 6+6 a
Se renversent, courbés sous le vent qui les bouge. 6+6 b
Une minute après, Durandal était rouge. 6+6 b
mètre profil métrique : 6+6
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