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Théodore de BANVILLE
IDYLLES PRUSSIENNES
1871
Orléans
Blessé, mourant, traînant son aile, 8 a
Un pauvre pigeon gris et blanc, 8 b
Apportant la bonne nouvelle, 8 a
Est arrivé, taché de sang. 8 b
5 Donc, ô Victoire, tu te lasses 8 a
De suivre machinalement, 8 b
En rampant dans les routes basses, 8 a
Le porte-cuirasse allemand ! 8 b
Tu ne veux plus, sous nos huées, 8 a
10 Car, même en tombant, nous raillons, 8 b
Ainsi que les prostituées 8 a
Marcher vers les gros bataillons. 8 b
Tu reviens ! sois la bienvenue ! 8 a
Dans les rangs d'où l'on t'exila 8 b
15 Tu ne pouvais être inconnue, 8 a
Puisque tes amants étaient là ! 8 b
Ce vin d'espérance et de fièvre, 8 a
Ce noble, ce généreux vin 8 b
Dans lequel tu trompes ta lèvre 8 a
20 En nous offrant son flot divin, 8 b
Oui, c'est chez nous qu'on le savoure ! 8 a
Nos fils, dont rien ne peut briser 8 b
La stoïque et mâle bravoure, 8 a
Connaissent ton rouge baiser. 8 b
25 Dans leurs maisons, au vent flottantes, 8 a
Ils savent te garder pour eux, 8 b
Et, lorsque tu quittes leurs tentes, 8 a
C'est une brouille d'amoureux. 8 b
Mais te voilà ! C'était un rêve. 8 a
30 Regarde-nous de tes yeux clairs, 8 b
Chère infidèle, dont le glaive 8 a
Met sur nos têtes des éclairs ! 8 b
Et brisons leurs fourches caudines ! 8 a
Là-bas, son épée à la main, 8 b
35 C'est Aurelles de Paladines 8 a
Qui t'emportait dans son chemin, 8 b
Et, recommençant notre histoire 8 a
Dans un long combat de géants, 8 b
Hurrah ! nos soldats de la Loire 8 a
40 Ont, en deux jours, pris Orléans ! 8 b
Orléans ! c'est là que la France 8 a
Trouve son plus cher souvenir ; 8 b
C'est de là que la délivrance 8 a
Vers nous encor devait venir. 8 b
45 Là, ce flot d'azur qui s'allume 8 a
Au soleil, ces bois et le val 8 b
Qui la vit passer dans la brume, 8 a
Flattant de la main son cheval, 8 b
Tout nous parle de la guerrière ! 8 a
50 O Prussien, qui t'aveuglais, 8 b
Orléans est la ville fière 8 a
D'où Jeanne a chassé les Anglais. 8 b
Ah ! sans doute, forte et sereine, 8 a
Dans la rue, en armure d'or, 8 b
55 Avec nous la bonne Lorraine 8 a
Combattait cette fois encor ! 8 b
Elle veille sur la chaumière ! 8 a
Et nos ennemis, en fuyant, 8 b
Durent entrevoir la lumière 8 a
60 De son doux sourire effrayant ! 8 b
Oui ! sans cesse, ô fatal présage ! 8 a
Le troupeau mené par Bismarck 8 b
Rencontrera sur son passage 8 a
La figure de Jeanne d'Arc ! 8 b
65 Et si son nom vient sur ma bouche 8 a
Au jour éclatant du réveil, 8 b
Lorsque enfin notre honneur farouche 8 a
Prend sa revanche au grand soleil, 8 b
C'est parce que jadis, haïe 8 a
70 Des traîtres qui sèment l'effroi, 8 b
Elle ne tomba que trahie 8 a
Par la lâcheté de son roi. 8 b
Et ce qui de tout temps vers elle 8 a
Ramène mon esprit charmé, 8 b
75 C'est que pour nous cette pucelle 8 a
Reste la foi du peuple armé, 8 b
Et que sa vertu d'héroïne 8 a
Brûle toujours, malgré les ans, 8 b
Flamme inextinguible et divine 8 a
80 Dans l'âme de nos paysans ! 8 b
mètre profil métrique : 8
forme globale type : suite périodique
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