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Louise-Victorine ACKERMANN
PREMIÈRES POÉSIES
1862
IX
In Memoriam
I
J'aime à changer de cieux, de climat, de lumière. 6+6 a
Oiseau d'une saison, je fuis avec l'été, 6+6 b
Et mon vol inconstant va du rivage austère 6+6 a
Au rivage enchanté. 6 b
5 Mais qu'à jamais le vent bien loin du bord m'emporte 6+6 a
Où j'ai dans d'autres temps suivi des pas chéris, 6+6 b
Et qu'aujourd'hui déjà ma félicité morte 6+6 a
Jonche de ses débris ! 6 b
Combien ce lieu m'a plu ! non pas que j'eusse encore 6+6 a
10 Vu le ciel y briller sous un soleil pâli ; 6+6 b
L'amour qui dans mon âme enfin venait d'éclore 6+6 a
L'avait seul embelli. 6 b
Hélas ! avec l'amour ont disparu ses charmes ; 6+6 a
Et sous ces grands sapins, au bord des lacs brumeux, 6+6 b
15 Je verrais se lever comme un fantôme en larmes 6+6 a
L'ombre des jours heureux. 6 b
Oui, pour moi tout est plein sur cette froide plage 6+6 a
De la présence chère et du regard aimé, 6+6 b
Plein de la voix connue et de la douce image 6+6 a
20 Dont j'eus le cœur charmé. 6 b
Comment pourrais-je encor, désolée et pieuse, 6+6 a
Par les mêmes sentiers traîner ce cœur meurtri, 6+6 b
Seule où nous étions deux, triste où j'étais joyeuse, 6+6 a
Pleurante où j'ai souri ? 6 b
II
25 Ciel pur dont la douceur et l'éclat sont les charmes, 6+6 a
Monts blanchis, golfe calme aux contours gracieux, 6+6 b
Votre splendeur m'attriste, et souvent à mes yeux 6+6 b
Votre divin sourire a fait monter les larmes. 6+6 a
Du compagnon chéri que m'a pris le tombeau 6+6 a
30 Le souvenir lointain me suit sur ce rivage. 6+6 b
Souvent je me reproche, ô soleil sans nuage ! 6+6 b
Lorsqu'il ne te voit plus, de t'y trouver si beau. 6+6 a
III
Au pied des monts voici ma colline abritée, 6+6 a
Mes figuiers, ma maison, 6 b
35 Le vallon toujours vert et la mer argentée 6+6 a
Qui m'ouvre l'horizon. 6 b
Pour la première fois sur cette heureuse plage, 6+6 a
Le cœur tout éperdu, 6 b
Quand j'abordai, c'était après un grand naufrage, 6+6 a
40 Où j'avais tout perdu. 6 b
Déjà, depuis ce temps de deuil et de détresse, 6+6 a
J'ai vu bien des saisons 6 b
Courir sur ces coteaux que la brise caresse, 6+6 a
Et parer leurs buissons. 6 b
45 Si rien n'a refleuri, ni le présent sans charmes, 6+6 a
Ni l'avenir brisé, 6 b
Du moins mon pauvre cœur, fatigué de mes larmes, 6+6 a
Mon cœur s'est apaisé ; 6 b
Et je puis, sous ce ciel que l'oranger parfume 6+6 a
50 Et qui sourit toujours, 6 b
Rêver aux temps aimés, et voir sans amertume 6+6 a
Naître et mourir les jours. 6 b
mètre profils métriques : 6, 6+6
forme globale type : suite de strophes
schéma : 11(abab) 2(abba)
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